L'AZERBAÏDJAN DÉCLARE QU'UN ACCORD DE PAIX EST "IMPOSSIBLE" COMPTE TENU DE LA CONSTITUTION ARMÉNIENNE ACTUELLE
Paris / La Gazette
Il est impossible pour l'Azerbaïdjan de conclure un accord de paix avec l'Arménie, son ennemi historique, tant que la Constitution actuelle de cette dernière reste inchangée, selon le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev.
La question des revendications territoriales de l'Arménie à l'encontre de l'Azerbaïdjan et de la Turquie est l'une des nombreuses questions en suspens dans l'accord de paix discuté entre Bakou et Erevan, a déclaré M. Aliyev jeudi lors d'une réunion avec les présidents du parlement de l'Assemblée parlementaire des États turciques à Bakou.
L'Azerbaïdjan n'a jamais eu de revendications territoriales à l'encontre d'aucun pays, y compris l'Arménie, a affirmé M. Aliyev.
« Ils doivent abandonner complètement les idées de revanchisme, et nous voyons que de telles idées existent non seulement dans l'opposition, mais aussi au sein du gouvernement. Toutes ces questions, bien sûr, doivent être clarifiées et réglementées », a-t-il martelé.
Le 19 janvier, le Premier ministre arménien Nikol PaChinyan a appelé à une nouvelle constitution lors d'une réunion avec des hauts fonctionnaires du ministère arménien de la justice. M. Pachinyan a affirmé que l'Arménie avait besoin « d'une nouvelle constitution, et non de changements constitutionnels », ajoutant que le nouveau document fondateur rendrait le pays « plus compétitif et viable dans le nouvel environnement géopolitique et régional ». Il a souligné que la nouvelle constitution maintiendrait le système parlementaire actuel et a mis l'accent sur la « sécurité extérieure » et le « territoire souverain internationalement reconnu » comme étant les principales questions à traiter. Le respect mutuel de l'intégrité territoriale de l'autre partie reste un point d'achoppement dans les négociations de paix entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Si Erevan donne suite à la proposition de M. Pachinyan, la nouvelle constitution éliminera certains obstacles à la signature d'un traité de paix avec Bakou.
On pense généralement que le plan de M. Pachinyan est lié à la normalisation des relations de l'Arménie avec l'Azerbaïdjan et la Turquie. Les fonctionnaires et les experts azerbaïdjanais soutiennent souvent que la constitution arménienne actuelle contient des revendications territoriales à l'encontre de Bakou et d'Ankara. En 2021, le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev a déclaré qu'il s'agissait de l'un des principaux obstacles aux efforts de paix dans le Caucase du Sud. Dans une interview accordée à un média turc, Aliyev a déclaré : « La Constitution de l'Arménie contient une revendication territoriale à l'encontre de la Turquie. Ils devraient l'abandonner. Ils doivent réviser et réadopter leur constitution. Ils doivent renoncer à leurs revendications contre la Turquie et l'Azerbaïdjan ».
L'ouverture du corridor de Zangezur est devenue une question plus controversée à cet égard et menace de faire dérailler le processus de paix. Dans une interview accordée aux chaînes de télévision locales le 10 janvier, M. Aliyev a déclaré que si ce corridor restait fermé, l'Azerbaïdjan refuserait d'ouvrir sa frontière avec l'Arménie ailleurs (President.az, 10 janvier). Le gouvernement azerbaïdjanais attend d'Erevan qu'elle assure un passage terrestre « sans entrave » entre la partie occidentale de l'Azerbaïdjan continental et l'enclave du Nakhitchevan, comme le prévoit la déclaration trilatérale de novembre 2020 mettant fin à la deuxième guerre du Karabakh. Bakou insiste sur le fait que les cargaisons, les passagers et les véhicules ne devraient être soumis à une inspection et à un dédouanement que lorsqu'ils voyagent au niveau international, et non entre l'Azerbaïdjan continental et le Nakhitchevan.
L'Arménie et l'Azerbaïdjan semblent s'accorder sur la nécessité de reconnaître sans équivoque l'intégrité territoriale de l'autre partie pour faciliter une paix durable dans la région. Les différends concernant le corridor du Zangezur risquent toutefois de retarder leurs efforts pour signer un accord de paix dans un avenir proche
M. Aliyev a également indiqué que l'Azerbaïdjan avait proposé à l'Arménie de demander conjointement à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) d'annuler le groupe de Minsk de l'OSCE parce qu'il « ne fonctionne pas aujourd'hui ».
« Nous ne le laisserons pas fonctionner de facto. Il reste à l'annuler de jure - légalement, et cela montrera la sincérité de l'Arménie. Si l'Arménie préfère maintenir le groupe de Minsk, ses revendications territoriales à notre encontre se poursuivront », a-t-il insisté.
M. Aliyev a ajouté que la récente restitution par l'Arménie de quatre villages frontaliers en Azerbaïdjan montre que les problèmes entre les deux pays peuvent être résolus pacifiquement par le biais de négociations.
« Si l'Arménie avait écouté nos paroles en 2020 et rendu nos terres pacifiquement, il n'y aurait pas eu besoin de la deuxième guerre du Karabakh et de l'opération antiterroriste. Cela devrait leur servir de leçon, et je vois qu'ils tirent, comme ils le disent, des conclusions de cette leçon », a-t-il abondé.
Créé en 1992, le groupe de Minsk de l'OSCE, présidé par la France, la Russie et les États-Unis, a échoué dans sa tentative de faciliter la résolution du conflit du Karabakh, qui a duré depuis des décennies.
L'Azerbaïdjan et l'Arménie s'efforcent actuellement de normaliser leurs relations après que l'Azerbaïdjan a reconquis le contrôle total de la région du Karabakh, qui était occupée illégalement depuis les années 1990 par des séparatistes arméniens soutenus par l'Arménie.
En 2020, une guerre de six semaines a permis à l'Azerbaïdjan de libérer de grandes parties de la région séparatiste et, en septembre 2023, les forces azerbaïdjanaises ont lancé une opération qui a contraint les « autorités » arméniennes du Karabakh à capituler lors de négociations menées sous la médiation des forces russes.
Depuis décembre, les deux parties s'efforcent d'entamer des négociations sur un traité de paix, dont les éléments clés sont la démarcation des frontières et l'établissement de corridors de transport régionaux à travers le territoire de l'autre partie.
À la fin du mois dernier, l'Arménie a rendu à l'Azerbaïdjan quatre villages frontaliers saisis dans les années 1990, ce qui constitue une avancée historique. Les deux parties ont également convenu d'une nouvelle délimitation de 12,7 kilomètres de leur frontière, rendant les villages de Baghanis Ayrum, Ashaghi Askipara, Kheyrimli et Ghizilhajili à l'Azerbaïdjan.
Le chef de la diplomatie azerbaïdjanaise, Djeyhoun Baïramov, a déclaré mercredi qu'il y avait moins de questions en suspens dans le projet d'accord de paix discuté entre les voisins.
« Je peux souligner qu'il y a une diminution du nombre de questions ouvertes dans le projet d'accord », a précié M. Baïramov lors d'une conférence de presse avec son homologue hongrois, Peter Szijjarto, en visite à Bakou.
Exprimant que l'Azerbaïdjan a présenté une version expurgée du prochain projet à l'Arménie, qui a été discuté lors des discussions dans la ville kazakhe d'Almaty le mois dernier, M. Baïramov a fait savoir que Bakou a reçu le prochain projet d'Erevan il y a quelques jours.
« Un certain nombre de points ont atteint le point où l'on peut observer une évolution positive. Il ne s'agit pas d'une simple réexpédition de projets antérieurs. En d'autres termes, nous observons une dynamique positive », a estimé le haut diplomate de l'Azerbaïdjan.
M. Baïramov et son homologue arménien, Ararat Mirzoyan, se sont entretenus le 10 mai à Almaty et les deux parties ont convenu de poursuivre les négociations sur les questions controversées.