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LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DOIT REMÉDIER À SES CONTRADICTIONS INSTITUTIONNELLES ENVERS L'AZERBAÏDJAN

22 Novembre 2021 07:44 (UTC+01:00)
LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DOIT REMÉDIER À SES CONTRADICTIONS INSTITUTIONNELLES ENVERS L'AZERBAÏDJAN
LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DOIT REMÉDIER À SES CONTRADICTIONS INSTITUTIONNELLES ENVERS L'AZERBAÏDJAN

La Gazette / Émile Mila

Dans un entretien accordé la semaine passée au quotidien « Le Monde », le ministre français des Affaires étrangères a évoqué l'actualité diplomatique mondiale, notamment la situation géopolitique au Caucase du Sud.

Interrogé sur la volonté signalée de la France de "relancer le dialogue à haut niveau avec la Russie", Jean-Yves Le Drian a souligné la nécessité pour le Quai d'Orsay de maintenir des lignes de communication ouvertes avec Moscou afin de "se dire les choses".

Rappelant divers dossiers sur lesquels l'Élysée et le Kremlin ont des "divergences profondes", tels que la guerre en Ukraine ou la situation au Sahel, le chef de la Diplomatie française a également fait état d'une possible "coordination" entre les deux pays sur le dossier nucléaire iranien ou la situation sécuritaire et politique en Afghanistan.

Parmi les dossiers de dialogue potentiel entre la France et la Russie, Jean-Yves Le Drian a également évoqué les tensions dans "le Caucase, pour poser les jalons d’une paix durable entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Le dialogue est nécessaire, surtout en temps de crise", a-t-il souligné.

Mardi, le Quai d'Orsay a exprimé [1] sa préoccupation face à la dégradation de la situation entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, après l'annonce par Bakou de l'utilisation d'artillerie lourde par l'armée arménienne sur sa frontière avec l'Azerbaïdjan. Sept militaires azerbaïdjanais ont été tués dans des combats qui les ont opposés mardi, aux forces arméniennes près de la région du Karabagh, a annoncé mercredi, le ministère azerbaïdjanais de la Défense.

Le ministère des Affaires étrangères françaises a souligné "la nécessité de poursuivre le dialogue" entre les deux pays sur "toutes les questions non résolues liées au conflit au Haut-Karabakh", sans pour autant évoquer les initiatives qui seront prises par Paris pour remédier aux contraventions d'institutions françaises au positionnement et aux engagements internationaux pris la France sur le conflit opposant Erevan à Bakou.

La contradiction institutionnelle française sur le Caucase du Sud

La France, amie de longue date de l'Azerbaïdjan, reconnaît officiellement la souveraineté de l'Azerbaïdjan sur la région géographique du « Karabakh » ainsi que les sept autres districts azerbaïdjanais occupés illégalement par Erevan pendant trois décennies et recouvrés par Bakou à l'automne 2020 à l'issue d'une guerre de 44 jours. Quatre résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies (822, 853, 874 et 884) et deux résolutions de l'Assemblée générale de l'ONU, reconnaissent également la souveraineté de la République d'Azerbaïdjan sur ces territoires.

S'ajoutant aux incohérences épisodiques de la position française [2] ayant mené à des divergences ponctuelles avec Bakou, l'État français manque fréquemment à son devoir d'univocité de ses institutions envers ses engagements internationaux, notamment à l'encontre de Bakou. Ainsi, des collectivités territoriales françaises adoptent des résolutions reconnaissant la soi-disant indépendance de la « République » autoproclamée du Karabakh ou de « l'Artsakh », alors même que le Traité d'Amitié France-Azerbaïdjan signé en 1993* stipule ouvertement la souveraineté territoriale azerbaïdjanaise sur cette région géographique ainsi que « l'inviolabilité de ses frontières ». Ce manque de clarté et de cohérence diplomatiques reflète une regrettable contradiction dans la position française sur le Caucase du Sud, et un manque de fermeté dans l'affirmation de la position française et de ses engagements pris au Caucase du Sud.

Appâtés par l'éventuel gain électoral que pourrait leur proférer l’adoption de positions favorables aux aspirations séparatistes des réseaux nationalistes arméniens de France [3] sur la question du Karabakh, des présidents de régions françaises telles que l'Île-de-France ou d'agglomérations urbaines comme Marseille ont adopté, au cours des années passées, des résolutions en contravention directe avec les engagements officiellement pris par l'État français, sans que les auteurs de ces résolutions ne fussent sanctionnées par la Justice française pour l'illégalité de leurs actions en vertu du Droit français.

Ce manque d'univocité française inquiète Bakou quant à la clarté du message porté par les dirigeants français dans le respect des engagements pris par la République Française envers la République d'Azerbaïdjan. L'Exécutif français, qui sait faire preuve de son amitié envers le peuple azerbaïdjanais [4], doit impérativement remédier à cette duplicité nuisible aux relations entre ces deux nations amies et retrouver le chemin du droit international et de la cohérence institutionnelle au sein de la République Française, afin de permettre l'éclosion d'une coopération forte avec l'Azerbaïdjan, pilier stratégique du Caucase.

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Notes :

1. La France souligne sa "pleine disponibilité" à contribuer au dialogue Azerbaïdjan-Arménie - La Gazette - 17 novembre 2021 : https://www.lagazetteaz.fr/news/politique/7707.html

2. Azerbaïdjan/France : La partialité de la France est la cause de la profonde crise actuelle - Agence Anadolu - 30 novembre 2020 : https://www.aa.com.tr/fr/politique/azerbaïdjan-france-la-partialité-de-la-france-est-la-cause-de-la-profonde-crise-actuelle/2060822

3. Arménie : les multiples dangers d’un nationalisme à distance – Article publié par « Atlantico » puis censuré sous la pression des réseaux nationalistes arméniens de France - 25 octobre 2021

4. La volonté de la France de participer au déminage des territoires azerbaïdjanais libérés est une initiative importante, estime un membre du Parlement de l'Azerbaïdjan - La Gazette - 15 octobre 2021 : https://www.lagazetteaz.fr/news/politique/7523.html

* Signé par le Président français François Mitterrand et son homologue azerbaïdjanais Heydar Aliyev le 20 décembre 1993 et ratifié par les deux États

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