CORRIDOR MÉDIAN : PIERRE ANGULAIRE D'UNE NOUVELLE ARCHITECTURE GÉOPOLITIQUE
Paris / La Gazette
À la fin de la première décade d'août, lors d'une réunion trilatérale tenue à Bakou entre les chefs des autorités ferroviaires d'Azerbaïdjan, de Géorgie et du Kazakhstan, en plus de l'examen des résultats des activités de sept mois de l'entreprise commune Middle Corridor Multimodal — créée pour faciliter une coopération efficace entre les administrations ferroviaires de ces pays pour le développement du Corridor Médian — un protocole a été signé pour inclure la société chinoise China Railway Container Transport (CRCT) dans l'entreprise. À cet égard, les participants à la réunion ont souligné que l'implication de Pékin créera de nouvelles opportunités pour organiser les expéditions de conteneurs de la Chine vers l'Europe, contribuant ainsi à un transport de marchandises continu, fiable et efficace le long du Corridor Médian.
Dans ce contexte, l'information concernant les plans du Département du Commerce des États-Unis d'envoyer une délégation représentative directement au Kazakhstan, en Azerbaïdjan et en Géorgie — les pays impliqués dans le Corridor Médian — pour analyser les perspectives de la route en termes de logistique, d'infrastructure et de commerce est particulièrement révélatrice.
Ce n'est pas un hasard si, lors des récentes discussions entre le ministre de l'Économie de l'Azerbaïdjan, Mikayil Jabbarov, et la chargée d'affaires des États-Unis dans à Bakou, Amy Carlon, les Parties ont partagé leurs points de vue sur les perspectives du Corridor Médian tout en discutant de l'expansion de la coopération économique entre les États.
Les États-Unis et l'UE considèrent le développement du Corridor Médian comme un élément crucial pour réduire la dépendance aux routes traditionnelles passant par la Russie. Pendant ce temps, la Chine vise à utiliser cette route comme une voie de transit alternative dans le contexte de la guerre en cours en Ukraine, ainsi que dans le cadre de l'initiative « La Ceinture et La Route ».
En chiffres, si le volume de marchandises transportées le long de ce corridor a augmenté de plus de 62 % en 2024, atteignant 4,5 millions de tonnes, cette année, il devrait atteindre 5,2 millions de tonnes, dont 4,2 millions de tonnes transiteront par les pays participant à la route.
La pertinence du fonctionnement réussi de cette route a été soulignée, en particulier, lors d'un récent entretien téléphonique entre le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev et le président kazakh Kassym-Jomart Tokayev à la suite des pourparlers entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan à Washington. Le président Aliyev a souligné que les accords conclus sur le transport sans entrave entre la partie principale de l'Azerbaïdjan et la République autonome du Nakhitchevan contribueront à de nouvelles tendances dans les capacités de manutention de fret du Corridor Médian.
La Route Internationale de Transport Transcaspienne (TITR), également connue sous le nom de Corridor Médian (Middle Corridor), a également été discutée lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur les Pays en Développement Sans Littoral (LLDC3) qui s'est récemment conclue il y a quelques jours à Avaza, au Turkménistan.
Comme l'a noté le ministre des Transports et des Infrastructures de la Turquie, Abdulkadir Uraloglu, l'utilisation active du Corridor Médian comme une route rapide et sécurisée contribuera au développement durable des pays enclavés. Dans ce contexte, la Turquie, située au carrefour de l'Europe, de l'Asie et de l'Afrique, est considérée comme un maillon clé dans le développement des itinéraires de transport multimodal, permettant à Ankara de se positionner comme un hub stratégique qui unit les lignes logistiques internationales.
À son tour, un rapport analytique du ministère des Transports de l'Ouzbékistan, présenté dans le cadre du projet « Développement de corridors de transport internationaux alternatifs et du Corridor Médian dans des conditions d'instabilité géopolitique », identifie la TITR comme l'une des routes alternatives pour le Kirghizistan, le Tadjikistan et l'Ouzbékistan. Le rapport insiste qu'il peut aider à diversifier les flux d'importation et d'exportation avec l'UE, les États-Unis, le Canada et d'autres, tout en offrant un accès aux marchés en croissance de la région Asie-Pacifique, de l'Inde et d'autres pays.
Le rapport souligne que le développement de corridors de transport de transit à part entière à travers les pays de la région crée une demande parmi les pays partenaires pour le « produit logistique » des États d'Asie centrale (c'est-à-dire le transit de marchandises à travers la région d'Asie centrale). Dans ce scénario, la région, en augmentant son importance dans l'exportation de services de transport, a l'opportunité de réduire les coûts d'exploitation de sa propre infrastructure ainsi que celle des pays partenaires grâce à des volumes de transit plus élevés et à une augmentation des exportations de services de transport. En intégrant leurs systèmes de transport dans les corridors de transit diamétraux transversaux de l'Eurasie, les pays d'Asie centrale peuvent se transformer en un important centre de transport et de logistique.
Le rapport a résumé que, dans le monde turbulent d'aujourd'hui, la mise en œuvre de grands projets de transport et de communication est souvent confrontée à la prédominance des motifs politiques—motivés par les intérêts des pays individuels ou des blocs—sur les considérations économiques. Par conséquent, les États qui envisagent de participer activement à de telles initiatives doivent analyser attentivement les risques et opportunités anticipés.
Ainsi, le Corridor Médan joue un rôle significatif dans la géopolitique mondiale. Ce Corridor, qui unit aujourd'hui une vaste géographie de pays, s'étend de l'Est à l'Europe occidentale, favorisant une meilleure compréhension mutuelle entre divers acteurs et régions.
