Lagazette

UN CANDIDAT AU CARACTERE AFFIRME : TBILISSI TIENT TETE A BRUXELLES

4 Novembre 2025 08:11 (UTC+01:00)
UN CANDIDAT AU CARACTERE AFFIRME : TBILISSI TIENT TETE A BRUXELLES
UN CANDIDAT AU CARACTERE AFFIRME : TBILISSI TIENT TETE A BRUXELLES

Le 4 novembre, Bruxelles dévoilera son rapport sur l’état de préparation de la Géorgie à rejoindre l’Union européenne. Ce document, très attendu, évaluera les progrès du pays sur la voie de l’adhésion et pourrait déterminer l’avenir de son statut de candidat.

La commissaire européenne à l’Élargissement, Marta Kos, présentera le paquet d’élargissement 2025 devant la commission des affaires étrangères du Parlement européen. Aujourd'hui, la vice-présidente de la Commission, Kaja Kallas, tiendra une conférence de presse à Bruxelles, tandis que l’ambassadeur de l’UE à Tbilissi, Paweł Herczyński, s’adressera à la presse géorgienne pour commenter les conclusions du rapport.

Mais alors que les relations entre Tbilissi et Bruxelles se sont sensiblement refroidies ces derniers mois, la question se pose : la Géorgie veut-elle encore de l’Europe — et l’Europe veut-elle encore de la Géorgie ?

Une relation sous tension

L’année écoulée a été marquée par une détérioration notable des relations entre la Géorgie et l’Union européenne. Les divergences politiques et idéologiques se sont accentuées, au point que certains observateurs n’excluent pas une remise en cause du statut de candidat du pays.

Le Premier ministre Irakli Kobakhidze a d’ailleurs déclaré qu’il ne serait « approprié » de revenir sur la question de l’adhésion qu’à la fin de 2028, un signe de prudence qui contraste avec l’enthousiasme européen d’autrefois.

« Une guerre froide politique »

Pour Archil Sikharulidze, analyste politique et fondateur du centre de recherche SIKHA Foundation, les tensions entre la Géorgie et Bruxelles s’expliquent avant tout par une confrontation politique directe.

« L’Union européenne a pratiquement déclaré une guerre froide au parti au pouvoir Rêve géorgien (Georgian Dream), qu’elle cherche à écarter du pouvoir », affirme-t-il.

Selon lui, le gouvernement géorgien n’a désormais d’autre choix que de se défendre et durcir sa rhétorique. Il ne s’attend donc pas à de grandes surprises le 4 novembre :

« Les critiques de l’UE contre le gouvernement ont perdu de leur force. L’opposition, affaiblie, n’arrive plus à mobiliser. Et cette frénésie autour du drapeau européen a, paradoxalement, terni l’image de l’Europe aux yeux de nombreux Géorgiens. »

L’expert souligne également la contradiction entre discours et réalité : d’un côté, certains responsables européens accusent Tbilissi d’aider Moscou à contourner les sanctions ; de l’autre, les mêmes instances remercient la Géorgie pour sa coopération.

« Il faut distinguer les faits objectifs des récits politiques. Les contes et souhaits apparaîtront sans doute dans la partie sur les droits de l’homme, rédigée par des auteurs ouvertement hostiles au gouvernement. Pour le reste, il est difficile de critiquer un pays qui reste le leader de la croissance économique parmi tous les candidats à l’adhésion. »

L’Europe, un rêve devenu mirage ?

Autre voix critique, Bidzina Giorgobiani, fondateur du mouvement United Neutral Georgia, estime que le rapport de Bruxelles sera biaisé dès le départ.

« Les rapporteuses, Kaja Kallas et Marta Kos, excluront délibérément les aspects positifs. Le même schéma se répète à Tbilissi avec Paweł Herczyński », explique-t-il.

Pour lui, la promesse européenne faite à la Géorgie n’a jamais reposé sur une base réaliste :

« L’intégration européenne de la Géorgie a toujours relevé d’un récit politique, pas d’une perspective géographique ou économique. L’Union européenne n’a pas les moyens — ni même la volonté — de s’étendre vers le Caucase du Sud. Sans frontière commune, ce projet ressemble à un mirage. »

Giorgobiani estime que Bruxelles se sert du statut de candidat comme d’un instrument de pression politique sur Tbilissi.

Il cite également la politique sociale de l’UE, notamment sur les questions LGBTQ+, comme un point de rupture culturel :

« L’Europe d’aujourd’hui n’est plus celle avec laquelle la Géorgie souhaitait s’aligner. Ce n’est plus le modèle de société que beaucoup de Géorgiens reconnaissent comme le leur. »

Un tournant pour la Géorgie

À la veille du rapport de Bruxelles, une chose semble certaine : la Géorgie ne renoncera pas à son indépendance politique, même au prix d’un refroidissement avec l’Union européenne.

Le pays reste divisé entre son désir d’intégration occidentale et sa volonté de préserver sa souveraineté face aux pressions extérieures.

Le 4 novembre pourrait ainsi marquer non pas la fin du rêve européen de la Géorgie, mais le début d’une nouvelle phase — celle d’une relation plus lucide, plus distante, mais peut-être aussi plus équilibrée entre Tbilissi et Bruxelles.

Loading...
L'info de A à Z Voir Plus