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L'ENGAGEMENT DU PAKISTAN EN ASIE CENTRALE : PRIORITÉS DE POLITIQUE ÉTRANGÈRE, DÉFIS ET PERSPECTIVES STRATÉGIQUES

6 Septembre 2025 13:22 (UTC+01:00)
L'ENGAGEMENT DU PAKISTAN EN ASIE CENTRALE : PRIORITÉS DE POLITIQUE ÉTRANGÈRE, DÉFIS ET PERSPECTIVES STRATÉGIQUES
L'ENGAGEMENT DU PAKISTAN EN ASIE CENTRALE : PRIORITÉS DE POLITIQUE ÉTRANGÈRE, DÉFIS ET PERSPECTIVES STRATÉGIQUES

Paris / La Gazette

Récemment, le développement des liaisons de transport est devenu l'un des principaux sujets des relations entre le Kirghizistan et le Pakistan. Étant donné que les pays ne partagent pas de frontière commune et sont situés à une distance considérable l'un de l'autre, l'établissement de nouvelles routes de transport est une étape cruciale pour surmonter les barrières géographiques et rapprocher les deux nations. Actuellement, Bichkek et Islamabad dépendent des routes de transit à travers la Chine, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et l'Afghanistan, ce qui complique la logistique et augmente les coûts de transport. De plus, la situation instable en Afghanistan ajoute des risques supplémentaires et ralentit la croissance du commerce.

L'un des domaines clés de coopération est le développement de corridors ferroviaires et multimodaux. Lors du sommet de l'Organisation de coopération économique en juillet 2025, le président ouzbek Shavkat Mirziyoyev a souligné l'importance du chemin de fer Chine-Kirghizistan-Ouzbékistan pour la région et a annoncé des plans pour le relier au chemin de fer transafghan (Ouzbékistan-Afghanistan-Pakistan). Une telle connexion pourrait former l'épine dorsale du transport durable entre le Kirghizistan et le Pakistan.

Pour le Kirghizistan, pays enclavé, l'accès aux ports internationaux est particulièrement important, le port pakistanais de Karachi recevant une attention particulière. En juillet 2025, une délégation kirghize dirigée par le premier vice-président du Cabinet des ministres, Edil Baisalov, a visité le port, où ils ont tenu des discussions avec les responsables du Karachi Port Trust et inspecté l'infrastructure du terminal à conteneurs de Hutchison Ports Pakistan. M. Baysalov a estimé que le développement de routes alternatives figure parmi les priorités du plan de développement national du Kirghizistan jusqu'en 2030.

Parallèlement, les deux Parties font progresser d'autres domaines de coopération. Lors de la cinquième session de la Commission intergouvernementale kirghize-pakistanaise, les deux pays ont signé un protocole et des mémorandums dans les domaines de l'investissement, du commerce halal, de la normalisation et de la métrologie. Le Kirghizistan a exprimé son intérêt pour l'établissement de liens commerciaux directs et le lancement de projets conjoints.

En ce qui concerne le commerce, selon le Comité national des statistiques du Kirghizistan, le chiffre d'affaires bilatéral entre les pays a atteint environ 7,7 millions de dollars en janvier-mai 2025, soit une baisse de 10 pour cent par rapport à la même période en 2024. Les exportations kirghizes n'ont atteint que 487 000 dollars, tandis que les importations en provenance du Pakistan ont dépassé 7,2 millions de dollars. Malgré des chiffres modestes, Bichkek et Islamabad prévoient d'augmenter le commerce mutuel à 500 millions de dollars dans les années à venir.

La coopération énergétique est également un axe majeur. Le plus grand projet de la région, CASA-1000, implique la construction de lignes de transmission pour exporter de l'électricité verte du Kirghizistan et du Tadjikistan vers le Pakistan et l'Afghanistan. Les travaux au Kirghizistan et au Tadjikistan sont déjà terminés, le Pakistan devant achever son segment d'ici la fin de 2025 et l'Afghanistan d'ici 2027. Le coût total du projet dépasse 1,2 milliard de dollars, avec un financement significatif fourni par la Banque mondiale et d'autres partenaires internationaux.

Une fois que CASA-1000 sera opérationnel, le Kirghizistan et le Tadjikistan pourront exporter jusqu'à 5 milliards de kilowattheures d'électricité par an, couvrant environ 5 % de la consommation annuelle du Pakistan. Selon le ministère de l'Énergie du Kirghizistan, cela pourrait générer environ 250 millions de dollars par an pour Bichkek et Douchanbé.

Ainsi, le projet revêt une importance stratégique tant pour les pays exportateurs que pour les pays importateurs. Le Kirghizistan et le Tadjikistan peuvent utiliser efficacement l'excédent d'hydroélectricité estivale, le transformant en une source de revenus et un moteur pour le développement du secteur énergétique. Pour le Pakistan et l'Afghanistan, cela offre une opportunité de réduire les pénuries d'électricité estivales et d'améliorer la sécurité énergétique.

Malgré l'absence de frontière commune, l'engagement politique et économique entre le Kirghizistan et le Pakistan devient de plus en plus ciblé et multiforme. Au cœur de ce dialogue se trouve le développement d'infrastructures capables de relier l'Asie centrale et l'Asie du Sud par des canaux de transport et d'énergie stables. Pour le Kirghizistan, cela ouvre de nouvelles opportunités : accès aux routes maritimes, augmentation des revenus énergétiques et participation aux principales chaînes d'approvisionnement régionales. En même temps, le Pakistan accède à de nouvelles sources d'énergie et étend sa présence en Asie centrale. Ces projets ont le potentiel de remodeler de manière significative la coopération régionale et d'établir une nouvelle norme pour l'intégration régionale.

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