LA TOUR DE LA VIERGE : PHARE, CHEF-D’ŒUVRE ARCHITECTURAL ET SYMBOLE DU BAKOU ETERNEL
Paris / La Gazette
Un voyage à travers l’Histoire
Depuis l’Antiquité, les phares se dressent comme des symboles d’espoir et de salut, guidant les marins perdus au milieu des tempêtes vers la sécurité du rivage. Plus que de simples prouesses d’ingénierie, ils incarnent l'endurance et la fidélité à leur mission, devenant au fil du temps des gardiens lumineux de la vie maritime.
Le plus célèbre d’entre eux fut le Phare d’Alexandrie, construit entre 283 et 247 avant notre ère sur l’île de Pharos, en Égypte. Haute de 120 mètres, cette merveille du monde antique demeura pendant des siècles la plus grande construction de la planète avant d’être détruite par un séisme. D’autres, comme la Tour d’Hercule à La Corogne (Espagne), érigée par les Romains au IIᵉ siècle, continuent encore aujourd’hui de témoigner de l’ingéniosité des anciens bâtisseurs. Même la Statue de la Liberté à New York servit de phare entre 1886 et 1902, saluant les navires arrivant dans le port américain.
La Tour de la Vierge : joyau de l’architecture azerbaïdjanaise
À Bakou, capitale de l’Azerbaïdjan, se dresse un monument qui, à son tour, a mêlé légende, histoire et lumière : la Tour de la Vierge (Qız Qalası). Située dans la partie sud-est de la vieille ville (Icheri Sheher), cette construction majestueuse et énigmatique est un chef-d’œuvre unique de l’architecture médiévale azerbaïdjanaise, sans équivalent dans tout l’Orient.
Les chercheurs continuent de débattre de la date de sa construction et de sa fonction originelle, ce qui ne fait qu’ajouter à son mystère. À travers les siècles, la tour a servi tour à tour de forteresse défensive, de temple du feu, d’observatoire, et même de phare, guidant les navires vers le port de Bakou grâce à la lumière se reflétant sur les vagues de la mer Caspienne — une véritable lueur d’espoir pour les marins rentrant au pays.
Une construction monumentale et mystérieuse
Édifiée sur un affleurement rocheux en bord de mer, la Tour de la Vierge mesure 28 mètres de haut et 16,5 mètres de diamètre. Ses murs, d’une épaisseur allant jusqu’à 5 mètres à la base, sont faits de calcaire gris local. À l’intérieur, un puits profond de 21 mètres creusé dans la roche depuis le troisième niveau permettait d’accéder à une eau pure et fraîche.
La datation de la tour demeure incertaine : certains experts l’attribuent au XIIᵉ siècle, sur la base d’une inscription coufique mentionnant « Masud ibn Dawud », probablement un maître d’œuvre. Toutefois, des historiens tels que Sara Ashurbeyli et Azad Nabiyev ont proposé des origines plus anciennes, situant la construction entre les Ier et VIᵉ siècles. L’historien Leonid Bretanitsky pense pour sa part que la tour fut érigée en deux étapes : la partie inférieure aux Ve–VIᵉ siècles, et la section supérieure au XIIᵉ siècle.
La Tour de la Vierge, phare de la Caspienne
L’histoire moderne de la tour se confond avec celle de la navigation sur la mer Caspienne. En 1858, elle fut transformée en phare, avec l’installation d’une lanterne à huile et de réflecteurs au sommet, permettant une visibilité de près de 15 kilomètres. Pour mieux se distinguer du paysage, une large bande blanche fut peinte autour de sa partie supérieure en 1895.
Durant près d’un demi-siècle, la tour guida les navires pénétrant dans la baie de Bakou, jusqu’en 1907, date à laquelle la lumière de la ville en pleine expansion obscurcit sa lueur. Sa fonction fut alors transférée au phare de l’île Boyuk Zira.
Un trésor du patrimoine mondial
En 2000, la Tour de la Vierge fut inscrite sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, en reconnaissance de sa valeur historique, architecturale et symbolique exceptionnelle. Aujourd’hui encore, elle domine les ruelles étroites d’Icheri Sheher, veillant sur la ville comme un gardien intemporel de son passé.
Symbole incontesté de Bakou et de l’identité nationale azerbaïdjanaise, la Tour de la Vierge demeure une source d’inspiration pour les chercheurs, artistes et voyageurs. Par son mystère, sa beauté et sa légende, elle continue de briller — tel un phare éternel — sur l’histoire et l’âme de la capitale de la mer Caspienne.