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« LE COLONIALISME BELGE : RECONNAISSANCE ET RESPONSABILITÉ ». CONFÉRENCE DU GROUPE D’INITIATIVE DE BAKOU – PARTIE III – LE RÔLE DES MEDIAS

21 Novembre 2025 01:50 (UTC+01:00)
« LE COLONIALISME BELGE : RECONNAISSANCE ET RESPONSABILITÉ ». CONFÉRENCE DU GROUPE D’INITIATIVE DE BAKOU – PARTIE III – LE RÔLE DES MEDIAS
« LE COLONIALISME BELGE : RECONNAISSANCE ET RESPONSABILITÉ ». CONFÉRENCE DU GROUPE D’INITIATIVE DE BAKOU – PARTIE III – LE RÔLE DES MEDIAS

Paris / La Gazette

La troisième et dernière table ronde de la conférence sur le colonialisme belge, qui s’est tenue le 31 octobre 2025 à Bakou a porté sur le rôle des médias dans la construction de la mémoire coloniale.

On le sait, la fait colonial a besoin d’une part de présenter un visage acceptable aux populations des pays colonisateurs, de détourner l’attention sur les crimes commis en créant une sorte de vitrine présentable. On appellerait ça aujourd’hui une image virtuelle, et par ailleurs de convaincre, dans la mesure du possible, les peuples colonisés, qu’on ne les soumet pas mais qu’on leur vient en aide. Dans ce travestissement de la réalité, les médias ont évidemment joué un rôle essentiel pendant et aussi après la colonisation.

C’est Hillary Peace Tumwesigire qui a introduit le sujet. Elle est Rwandaise, journaliste, et Secrétaire générale de Rwanda Gender Media Connect

« Quand on parle de la manière dont les médias façonnent la mémoire coloniale, on parle en réalité de ceux qui ont le droit de raconter l'histoire et de ceux dont les voix sont étouffées.

Les médias ne sont pas de simples miroirs reflétant l'histoire ; ils sont des conteurs actifs. Ils décident quels aspects de l'histoire coloniale sont mis en avant, lesquels sont simplifiés et lesquels sont effacés. Pendant longtemps, l'histoire du colonialisme a été racontée principalement du point de vue du colonisateur, présentant l'empire comme un progrès et la colonisation comme une civilisation. Mais ce récit sélectif a fait plus que déformer l'histoire : il a façonné la manière dont les sociétés perçoivent aujourd'hui l'identité, la race et le pouvoir.

Si l'on se penche sur l'histoire du Rwanda, le colonialisme a joué un rôle central dans la réécriture de notre mémoire collective. L'administration coloniale, par le biais de ses propres médias et systèmes éducatifs, a construit de faux récits sur les différences ethniques, des récits qui déshumanisaient certains et en privilégiaient d'autres. Ces mythes coloniaux ont ensuite été recyclés par les médias postcoloniaux avant et pendant le génocide de 1994 contre les Tutsis, lorsque les radios de la haine et la propagande sont devenues des instruments d'extermination. Cela montre à quel point la mémoire coloniale peut devenir dangereuse lorsqu'elle n'est pas remise en question, lorsque les médias deviennent la voix de la division plutôt que celle de la vérité.

Et si l'on y regarde de plus près, la mémoire coloniale est aussi profondément marquée par le genre. À l'époque coloniale, les médias dépeignaient les femmes des sociétés colonisées comme impuissantes ou soumises, et les hommes comme primitifs ou violents. Ce cadrage justifiait à la fois la domination coloniale et le patriarcat. Nous en voyons encore des traces aujourd'hui, lorsque les femmes africaines sont principalement présentées comme des victimes de la pauvreté ou des conflits, et rarement comme des actrices du changement ou des gardiennes du savoir.

Au Rwanda, les femmes n'ont pas seulement été victimes du génocide contre les Tutsis, elles ont aussi été des bâtisseuses de paix, des survivantes et des figures de proue de la reconstruction. Pourtant, leurs histoires ont souvent été passées sous silence dans les récits dominants. Se réapproprier ces histoires contribue à panser les plaies liées au genre et à l'histoire.

La bonne nouvelle, c'est que de nouvelles générations de journalistes, de cinéastes et de conteurs numériques rwandais sont en train de changer la donne. Ils utilisent les médias pour affronter l'héritage colonial, lutter contre les inégalités de genre et réécrire la mémoire selon notre propre perspective. Mais nous ne devons pas nous focaliser uniquement sur le Rwanda. Tant de pays subissent encore les conséquences du post-colonialisme et il est impératif de nous unir pour démanteler le néocolonialisme qui nous affecte encore, nous et la nouvelle génération. De nouvelles stratégies s'imposent.

Ainsi, lorsque nous nous demandons : « Comment les médias façonnent-ils la mémoire coloniale ? », nous devons également nous interroger : Quels médias ? Quelle mémoire ? Quelle histoire est racontée ? Car la manière dont nous nous souvenons du colonialisme et de ses conséquences, ainsi que les voix que nous mettons en avant, influenceront toujours le type d'avenir que nous imaginons et construisons ensemble. »

C’est ensuite une brillante doctorante en Socio-anthropologie, conférencière internationale et créatrice de contenu, Marie-Fidèle Dusindize, qui propose sa vision de sociologue sur le rôle des medias dans l’acte colonial et également sur les supports qui sont aujourd’hui à notre disposition pour contrecarrer ces récits et donner la voix au afro-descendants ?

« Je suis doctorante en socio-anthropologie, je suis enseignante créatrice de contenu sur les réseaux sociaux et mon expertise s’axe sur les réalités qui sont traversées par la jeunesse afro-descendante en Belgique, post-coloniale. Je veux vous montrer la manière dont les médias vont vraiment construire les imaginaires, comment cette mémoire coloniale va circuler, se transformer, et surtout réinventer.

Comment a commencé l’influence des médias sur la construction de la mémoire ? Durant la période coloniale, on va utiliser de nombreux outils : la presse, la radio, les films et ce sont ces supports qui vont contribuer à fabriquer l’imaginaire colonial d’une Europe civilisatrice, et de ces autres territoires qui sont considérés comme autres, qui sont considérés comme exotiques, et qui sont considérés surtout comme inférieurs. Faisons donc un bref retour historique : nous sommes au XIXe siècle, à une époque où l’Europe est traversée par un certain déclin socio-économique , et où on sait que dans ces autres territoires, il y a une énorme quantité de richesses, notamment en Afrique et qu'il faut par conséquent trouver une excuse s’y rendre et se les approprier. On va alors inventer le concept de « mission civilisatrice ». En parallèle il y a aussi une volonté du monde scientifique de classifier les êtres humains. On veut comprendre, on veut connaître ce qui se passe de cet autre côté du monde, comme sont ces autres personnes. A cette époque, tout le monde ne pouvait pas voyager, alors on a envoyé des chercheurs, des anthropologues, et ces gens-là ont commencé à écrire ce qu’il voyaient sur ces territoires, ils ont décrit ces personnes comme étant différentes, et surtout comme étant inférieures.

On commence là à avoir accès aux premiers supports écrits pour décrire cette réalité coloniale. On est vraiment au cœur de la naissance du rôle de la Presse. Les médias vont véritablement devenir une machine à construire ses stéréotypes. Ce seront des acteurs extrêmement puissants. Il faut savoir que à cette époque-là , il y a eu tout un travail d’iconographie, un travail d’image pour convaincre le monde scientifique et les citoyens que la théorie des races était une bonne chose et la mission civilisatrice était un bon plan, et c’est particulièrement à travers la presse qu’on a construit cette représentation de l’Afrique, des colonies, des peuples dits indigènes. On va voir qu’aujourd’hui, et notamment en Belgique, ces stéréotypes continuent à animer les sociétés. Ceci explique pourquoi les personnes afro-descendantes vont être vont être victimes d’un mauvais traitement social. Les Belges sont en effet encore animés par ces représentations qui n’ont absolument pas été déconstruites.

Alors comment parle-t-on de cette histoire coloniale aujourd’hui en Belgique ? On la représente généralement comme une conquête territoriale. D’ailleurs la manière dont on parle de l’histoire coloniale c’est souvent à travers la porte d’entrée du Congo. Le Congo va représenter de manière symbolique la violence extrême Coloniale. Mais du coup, en parallèle, les questions qui concerne le colonialisme au Rwanda et au Burundi vont être un peu un peu moins abordées. En ne présentant le colonialisme belge que comme une une conquête de terres, on cache le fait que c’est aussi et surtout une histoire de viol, une histoire d’exploitation une histoire de meurtre de masse, de pilage et de catastrophe écologique. Mais, l’histoire coloniale c’est aussi une histoire de résistance, car de nombreuses populations se sont opposées à cette invasion dès que les premiers colons sont arrivés sur ces territoires. On est au cœur d’un enjeu essentiel : on parle du concept de l’épistémologie. L’épistémologie c’est quoi ? C’est la manière dont on va raconter l’histoire, le fait de ne pas mettre en avant ces récits de résistance, c’est un moyen en fait de maintenir cette représentation des personnes noires comme étant inférieures, passives, et cela permet surtout de maintenir le mythe du modèle démocratique démocratique de l’Europe.

Quel est le vraiment le rôle des médias ? On l’a compris, il s’agit d’un outil extrêmement puissant, et sa faculté ultime c’est de pouvoir représenter la pensée. Les médias vont ainsi avoir un impact très concret sur la diffusion des stéréotypes, particulièrement dans la presse.

J’ai identifié trois acteurs, en tant que sociologue : d’abord l’église, ensuite l’État et puis les entreprises. Et on va voir que dans le monde médiatique, le système de la presse va toujours s’inscrire dans des adaptations, c’est-à-dire que en réalité lorsqu’on s’intéresse à la propagande coloniale, que ce soit dans les medias, dans les documentaires, on met souvent en avant que tout a commencé quand les colons étaient là. Mais en fait cela a commencé bien avant. Avant même la conférence de Berlin, on a organisé tout un système de propagande pour faire en sorte que Léopold II, 10 ans plus tard, puisse s’accaparer les terres africaine, et bien sûr le Congo. Et quand Léopold II a commencé avoir une mauvaise image internationale, il fallait continuer ce martelage de propagande coloniale parce que justement, constatant que Léopold II, avait commis trop d’exactions, il fallait faire évoluer la propagande et montrer que les personnes noires étaient des bons travailleurs. Ainsi, quand il y a eu la passation de la colonie, cherché à démontrer que la mission civilisatrice était destinée à éduquer les noirs et donc a adapté en permanence le discours des médias pour faire en sorte que cela se perpétue. Il y a eu par conséquent un effort colonial continu.

Puis nous arrivons à un tournant historique : celui des zoos humains. Les colonisateurs décident d’aller chercher sur place des peuples colonisés pour les parquer et leur faire performer une image d’êtres non civilisés. Les expositions coloniales vont être des outils médiatiques majeur qui vont concrètement façonner les stéréotypes, qui vont s’ancrer dans les inconscients collectif. On crée ainsi des rapports entre le eux et le nous. Alors est-ce qu’il faut comprendre c’est que aujourd’hui les représentations coloniales pour les Belges sont omniprésentes. Elles sont dans tout et pour tout, c’est-à-dire que lorsque le Belge se lève, et qui va boire une tasse de chocolat, le chocolat le renvoie au Congo, lorsque son petit-fils va ouvrir sa petite BD que le titre c’est Tintin au Congo, ça le renvoie à l’histoire coloniale. Lorsque les populations afro-descendantes vont prendre le métro pour aller se rendre au travail et qu’elles croisent des bustes de Léopold II, des statues d’acteurs de la colonisation, on a encore des des traces du Congo. Ce sont des éléments qui nous donne des indices en fait sur la manière dont le discours colonial reste très présent et très dominant dans l’espace public et dans la vie quotidienne des Belges.

Alors la question qu’on va se poser, c’est comment on représente les populations noires à travers ces iconographie à travers ces images à traverser ces éléments de presse. La représentation des personnes noires, notamment de la population congolaise, arrive très tardivement. D’abord on peint les personnes congolaises à côté d’animaux, on les peint presque nus, toujours pour pouvoir matérialiser une représentation coloniale d’infériorité. Et c’est dans les années 60 qu’on voit que les dessins, les peintures, commencent à évoluer. On commence à les dessiner avec une représentation plus civilisée, à l’occidentale. On est vraiment là au cœur d’une évolution, mais à aucun moment ces iconographies ne représentent une réalité locale. Alors le monde médiatique va vraiment participer à un martelage intense qui va littéralement formater notre inconscient à la déshumanisation. Si on regarde l’image qui illustre le titre de cette conférence, on voit bien à quoi la communauté afro descendante est toujours exposée et l’un des éléments dont on ne parle pas assez, c’est l’impact de ces images sur la santé mentale et la représentation de soi pour les personnes afro descendantes. On voit donc la nécessité de raconter cette histoire autrement, parce que l’histoire coloniale, en tout cas celle du peuple africain c’est pas seulement une histoire de pressions, c’est une histoire de résistance.

Dans les années 60, la Belgique est pris de court, c’est-à-dire que c’est le déclin des colonies, et par conséquent la presse de s’adapter. Je vous ai expliqué que la presse s’adapte toujours. Donc les médias commence à retourner leur veste. Avec l’arrivée des indépendances, bizarrement, la presse commence à avoir un regard un peu plus critique sur la colonisation. Et puis, une fois les indépendances établies, on a encore un retournement de veste du monde médiatique. Il commence à se dire : "mais qu’est-ce que c’est que ces peuples africains qui n’arrivent pas à gérer leur pays depuis que nous, les colons, sommes partis".

Alors qu’en est-il d’aujourd’hui ? On se rend compte que les représentations et les discours coloniaux continuent à se perpétuer. Par exemple, quand on regarde la communication des O.N.G. on constate une représentation misérabilisme de l’Afrique, avec les bébés avec des mouches dans les yeux. Ce misérabilisme s’exprime aussi dans les discours médiatiques politiques. On se souvient de Sarkozy déclarant que l’homme noir n’est jamais rentré dans l’histoire. On constate qu’on assiste toujours à une perpétuation de ses discours coloniaux.

Alors quelles questions devons-nous nous poser à propos du fait colonial en Belgique ? J’ai identifié 6 thèmes. Le premier, c’est comment on aborde l’histoire coloniale dans les livres. Ensuite le deuxième c’est comme le monde politique s’intéresse à l’histoire coloniale. Troisièmement, la culpabilité des Belges. Effectivement, très régulièrement à la télé on voit des Belges très tristes de devoir parler de toutes ces histoires qui sont très heurtantes pour eux, notamment le fait de voir l’image de Léopold II, qui était le roi bâtisseur, ainsi dégradée. Ensuite on a toutes les questions qui concerne les objets visibles dans l’espace public, à savoir les noms de rues les statues, les œuvres d’art qui sont dans l’espace public. Et puis naturellement, le Musée royal d’Afrique centrale. On en a parlé en introduction, avec tout ce qui concerne les objets d’art et leur restitution. Et pour finir on a la figure de Léopold II, à savoir les débats pour savoir si c’est un roi bâtisseurs ou bien génocidaire.

Mais ce que je voudrais vous dire c’est qu’on arrive à un tournant médiatique,. Ce tournant médiatique, c’est Internet. Si on s’interroge sur où la parole à descendante s’exprime, on constate que dans le monde médiatique, les personnes afro-descendantes n’ont pas d’espace pour s’exprimer et que dans le monde académique également, elles sont extrêmement marginalisées. La jeunesse afro-descendante s’organise énormément sur les réseaux sociaux, à travers différents types de supports : podcasts, vidéos, les jeunes sont sur Instagram, TikTok, YouTube . Pourquoi internet est intéressant ? Parce qu’il offre une possibilité illimitée de pouvoir enfin distribuer l’information. On n’est plus à l’époque colonial où elle était mise sous séquestre. Ces créateurs de contenus permettent justement de créer une autre porte d’entrée pour parler de cette histoire coloniale. Une histoire coloniale qui part des résistances, une histoire coloniale qui est critique par rapport aux actes de la Belgique. C’est un moyen pour les afro-descendants de pouvoir reprendre la parole dans un espace incontrôlable par l’État , et je dis cela aussi en tant que créatrice de contenus, qui crée énormément de contenu sur la question coloniale.

Je vous invite à déplacer votre regard. Je vous présente une jeunesse afro descendante qui ne se victimise pas, qui ne se plaint pas , qui construit, qui crée des politiques d’action, qui n’a pas besoin de vampiriser les luttes afro-américaines pour s’en sortir. Internet va vraiment être un outil puissant parce qu’il va permettre à la jeunesse de pouvoir s’instruire, se déconstruire et forger vraiment une pensée critique. Un autre élément très important est l’impact du soft power. Aujourd’hui les succès noirs dans le monde de l’art montrent qui il y a vraiment une évolution dans les représentations, je parle spécifiquement dans le monde de la musique et dans le monde cinématographique avec la montée de l’afrobeat, le film Black Panther qui a été un des films qui a marqué notre époque contemporaine dans la représentation des personnes noires, parce que ce sont des personnes noires qui se sont représentés eux-mêmes dans la dignité. Alors pour conclure, je voudrais mettre en évidence à quel point la mémoire coloniale et l’impact des médias n’appartient pas au passé, c’est quelque chose d’extrêmement présent. C’est un champ de force qui est totalement continu. »

Suite à cette brillante intervention, Jean-Michel Brun souligne que cela rappelle le fameux discours, prononcé le 28 juillet 1885, la même année que celle de l’occupation du Congo par la Belgique, par le « père de l’école laïque », Jules Ferry, auquel nos politiciens se plaisent à se référer aujourd’hui :
« Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures. […] De nos jours, je soutiens que les nations européennes s’acquittent avec largeur, grandeur et honnêteté de ce devoir supérieur de la civilisation. »

Ce à quoi Georges Clémenceau répondit :
« Races supérieures ! Races inférieures ! C’est bientôt dit. Pour ma part, j’en rabats singulièrement depuis que j’ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande, parce que le Français est d’une race inférieure à l’Allemand. Depuis ce temps, je l’avoue, j’y regarde à deux fois avant de me retourner vers un homme et vers une civilisation et de prononcer : homme ou civilisation inférieure ! »

Malgré la réaction de Clémenceau, Jules Ferry reste une des figures tutélaires de la République française, honorée, adulée, par la quasi-totalité de la classe politique française.

Un autre exemple est naturellement l’exposition coloniale de 1931 à Paris, qui illustre de façon particulièrement sinistre le façonnage de l’inconscient collectif dont parlait Marie-Fidèle. Et précisément, comment la propagande s’est-elle insérée dans le discours médiatique ? La question est posée à Dieudonné Kwebe – Kimpele.

« Un media, c’est une entreprise, qui fabrique un produit qu’il doit vendre. Pour le vendre, il faut qu’il ait des clients. C’est cela un media : une entreprise qui doit faire des bénéfices et qui produit un bien immatériel qu’on appelle l’information, qu’il doit vendre des clients, qu’on appelle le Mass, c’est à dire un groupe d’intérêt.

À quel moment intervient la propagande, pour utiliser le terme tout à fait exact de Jean-Michel, à quel moment intervient la manipulation de l’information ou la propagande ? Il faut savoir que il y a cinq séquences dans le processus de production de l’information : il y a la phase de collecte, la phase de traitement de l’information, la phase de conditionnement de l’information, puis la phase de diffusion ou de publication de l’information, et enfin la phase de consommation de l’information. Au moment des deux dernières phases, le crime est déjà commis. Au moment de la publication, de la diffusion de l’information, le crime est déjà commis : le crime de propagande, ou de mensonge ou de manipulation. C’est au moment de la collecte qu'il se commet. Qui fait la collecte ? Ce sont les agences de presse. Pour créer une agence de presse, il faut avoir des gros capitaux, qui ne sont pas à la portée de tout le monde. Il y a actuellement dans le monde des agences qui sont très connues : L’Agence France Presse, l’agence Belga, l’agence Tass, l’agence Reuters, qui est probablement la plus grande etc. Ces agences sont des grossistes de l’information. Elles envoient dans les pays où il se passe des évènements, soit des correspondants permanents qui surveillent un secteur de l’information, soit des envoyés spéciaux. Mais lorsque ces gens arrivent sur le terrain, ils ne viennent pas pour dire la vérité en toute objectivité. Ce n’est pas vrai. Ils viennent pour répondre à ce qu’on appelle la ligne éditoriale. Quand ils partent de leur salle de rédaction pour aller sur le terrain, ils ont déjà en tête la ligne éditoriale. Toutes les informations qui ne cadrent pas avec la ligne éditoriale sont mises de côté, ou alors déformées, arrangées, afin qu’elles puissent rentrer dans le moule de la ligne éditoriale.

Alors qu’est-ce qui s’est passé pendant la période coloniale ? Tous les médias que consommait le colonisé venaient du colonisateur, en l’espèce, de la Belgique. en particulier de La libre Belgique et du Soir de Bruxelles, lesquels fabriquaient un discours destiné d’abord à rassurer les colonisateurs sur place en leur disant : « vous faites du bon travail, n’ayez aucun scrupule, Vous êtes en train d'effectuer une mission de civilisation ». De fait, ils validaient la présence et les actes des colonisateurs. Pour ceux des colonisés qui savaient lire et écrire, on a sorti des journaux en langues nationales, c’est-à-dire en Kikongo, en Swahili, en Tshiluba et surtout en Lingala. Et ces écrits étaient en fait des traductions, des fac-similés des journaux en langue française, mais sur le mode « soft » parce que d’après le concept colonial, il ne fallait surtout pas que le jeune Congolais soit éduqué pour qu’il comprenne les choses. Il était traité comme un enfant. Ce qu’on lui racontait était comme une fable de La Fontaine. Ces journaux avait pour but de valider la présence du colonisateur sur le terrain, de faire accepter par le colonisé la présence de la colonisation, et donc ce n’était pas de l’information. C’était tout simplement de la manipulation et de la propagande. En fait ce qui s’est passé pendant la colonisation pour valider la colonisation, c’est la même chose que ce qui s’est passé avec l’esclavagisme. L’esclavagisme a été pratiquée pendant 350 ans et vous savez que même l’église catholique a pratiqué la traite des noirs.

Pour faire valider une idée, quel que soit son caractère monstrueux, on travaille sur le mental, sur l’imaginaire, comme l’a souligné Marie-Fidèle. Pourquoi fait-on appel à l’imaginaire ? Parce que on écrit un journal pour un public. Je vous donne un exemple : j’étais l’éditorialiste de Mobutu. Un jour, Colette Braeckman, qui était sociétaire du journal Le Soir, écrit un article incendiaire contre Mobutu. Mobutu appelle Beyeye Djema, qui était alors ministre de la culture, pour lui demander d’aller voir la journaliste afin de la prier de ne pas être aussi agressive envers lui. Beyeye est venu me voir à Bruxelles. Je lui ai dit : « Ce n’est pas la peine. Colette Braeckman écrit pour le public du Soir, et si jamais elle écrivait un article qui contredit la ligne éditoriale, Le Soir perdra ses lecteurs ». En réalité, quand un journal choisit son « mass », son groupe d’intérêt, il devient prisonnier de ce groupe d’intérêt. Il ne peut pas changer. Tant est si bien que les faits d’actualité sont arrangés, manipulés, pour qu’ils rentrent dans le moule. Et tout l’art du journaliste est d’être capable de manipuler l’information sans que les gens s’aperçoivent que c’est de la manipulation. Il décrit une situation en soulignant par exemple un fait, et minimisant ou en taisant un autre.

Un cas exemplaire est celui de Colin Powell, l’ancien secrétaire d’État américain, qui se présente aux Nations Unies avec un flacon qu’il présente comme contenant de l’anthrax, qui était le poison censé avoir été utiliser par Saddam Hussein pour tuer les gens. Tous les medias du monde entier, même le New York Times, le Washington Post, ont répercuté cette information, comme si elle était vraie. Parce qu’il fallait absolument que Saddam Hussein soit éliminé. À ce moment, le journal sert tout simplement de caisse de résonance parce que c’est ce que veut celui qui a créé le journal. Ça ne dépend pas du journaliste. Le journaliste n’est qu’un simple employé qui est payé à la fin du mois, et s’il ne fait pas bien son travail, il est mis à la porte. Souvent, les gens s’en prennent au journaliste. Mais le responsable, ce n’est pas lui. C’est la ligne éditoriale qui le demande. J’ai assumé pendant plusieurs années des fonctions de directeur de la rédaction, et quand on m’amenait un article, je disais parfois : cet article, il est peut-être bien écrit, mais il n’entre pas dans la ligne éditoriale, il faut le retoucher. Ça, c’est la phase de traitement, la deuxième phase. Mais je vous ai dit, la manipulation de l’information, la propagande intervient au niveau de la collecte, c’est à dire que le journaliste voit ce qu’il veut bien voir, et transmet l’information à la rédaction où journalistes traitent l’information selon la ligne éditoriale. C’est donc dans ces deux phases qu’intervient le crime contre l’objectivité et l’honnêteté, car je suis assez âgé pour le savoir, en matière de journalisme, l’objectivité n’est rien. L’important, l’honnêteté et ça c’est une qualité qu’on retrouve de moins en moins de nos jours.

Et c’est pour cela que les réseaux sociaux sont devenus de plus en plus importants aujourd’hui : parce que celui qui publie sur un réseau social ne passe pas ces phases. C’est lui-même qui fait la collecte, le traitement et la diffusion. Au milieu, il n’y a personne. Quand vous transmettez un élément sur YouTube, vous êtes un témoin de ce que vous avez vu, et vous soutenez vos propos par des images. Voilà pourquoi aujourd’hui ce qu’on appelle les mainstreams, les grands journaux sont en perte de vitesse, parce que le temps du mensonge et de la manipulation est terminé. »

« Voici une magnifique leçon de déontologie journalistique » souligne Jean-Michel Brun. « Oui je le rappelle d’ailleurs toujours à mes étudiants en journalisme : il ne faut jamais parler de l’objectivité du journaliste. Un journaliste n’est pas objectif, puisqu’il regarde les faits avec ses propres yeux, sa culture, son expérience. Son devoir, comme tu le dis, c’est d’être être honnête, c’est à dire ne pas tromper le public, soit volontairement en essayant de le convaincre de ses propres a priori, soit simplement en faisant mal son métier. »

C’est ensuite un autre journaliste qui prend la parole. Cedrick Aundu Monzia est un des journalistes les plus actifs dans l’univers des médias congolais puisqu’il est délégué général de Voice of Congo, le plus important media d’information online du Congo, avec environ deux millions de lecteurs. Il aborde la question du rôle des medias en RDC, leur impact dans le domaine qui nous interesse aujourd’hui, à savoir la reconnaissance de la colonisation belge.

« Effectivement, les médias sociaux ont le vent en poupe. Notre média ligne Voice of Congo, possède au moins 2 600 000 abonnés. Nous croyons qu’associé à la force de l’information que nous livrons à tout moment et à chaque instant, le travail qui est fait en ce moment à Bakou va porter ses fruits. Le travail que nous sommes en train de faire ici devrait être relayé par des medias sociaux parce que ce sont les canaux d’information les plus puissants à l’heure actuelle. Il n’y a pas longtemps, un mois je crois, il y a eu à Kinshasa le braquage d’une banque, et j’étais sur place. J’ai filmé l’évènement et je l’ai diffusé. Nous avons atteint plus de 1 600 000 personnes, juste pour une information de moins de 5 minutes. La force qu’ont les médias sociaux aujourd’hui doit être utilisée pour des thématiques comme la décolonisation. Par exemple, ce débat a lieu devant un public réduit. Ceux qui sont marginalisés sont loin de nous. Nous, en tant que media en ligne, avons la capacité de leur retransmettre cette information, et de leur dire, qu’à Bakou, nous avons martelé qu’il était temps d’être décolonialisés, désaliénés, démarginalisés. Le discours des medias pendant la colonisation a été un discours paternaliste, c’est à dire qu’il portait le message que le colon souhaitait transmettre au public, lui mettre dans la tête. Aujourd’hui, dans la dynamique de ce qui a été dit ici, à Bakou, nous devons prendre la résolution de sensibiliser nos populations sur cette thématique de la décolonisation. Arriver à créer des contenus selon la tendance actuelle, ça veut dire sur les réseaux comme TikTok, ou Instagram, parce que ce sont des réseaux qui sont fréquentés par les jeunes. Il faut pousser la jeunesse à intéresser sérieusement à cette thématique. Parce que aujourd’hui, ici à Baku, nous parlons de la décolonisation, mais quand je développe ce même à Kinshasa, les gens me regardent avec scepticisme. Ils ne comprennent pas que tous nos maux viennent de la colonisation.

Nous devons donc jouer la partition de la « belle mélodie », ne pas être trop brutal parce que nous, les réseaux sociaux, nous sommes particulièrement surveillés et traqués car nous sommes hors ligne par rapport à l’ensemble de la presse traditionnelle. Les acteurs des réseaux sociaux, surtout à Kinshasa, restent dans l’anonymat, on ne sait pas d’où ils travaillent, de crainte d’être tués ou emprisonnés. Alors nous allons jouer cette belle mélodie pour aider nos jeunes à être décolonialisés, libérés des stéréotypes imposés par nos bourreaux. Nous sommes le quatrième pouvoir. La presse un grand rôle à jouer. Nous devons arriver après cette conférence à mettre en place ce qu’on appelle une armée numérique permettant que ce discours qui est le nôtre ici puisse être propagé partout. Arriver à créer une communication forte autour de ce thème, aider les jeunes à s’approprier cette thématique de la décolonisation, et remettre en question le récit dominant sur la colonisation, en offrant de perspective diverses pour permettre à déconstruire le récit colonial qui a longtemps dominé l’histoire belge et continue d’influencer les mentalités. Ensuite, nous devons arriver à faire émerger une mobilisation citoyenne. Les médias en ligne doivent encourager la mobilisation citoyenne sur des questions comme la justice sociale, le racisme, la décolonisation, permettant ainsi aux citoyens d’être plus actifs et engagés dans le débat public, mais aussi faire un travail de contre-pouvoir face aux institutions. Cela veut dire en menant des enquêtes et des analyses critiques sur les conséquences de la colonisation, offrant ainsi une perspective différente de celle des médias traditionnels. En somme, les médias en ligne sont des outils essentiels dans le processus de la décolonisation en Belgique car ils permettent de faire revivre le débat public, de remettre en question l’héritage colonial, de soutenir la revisitation des savoirs autochtones et de stimuler la mobilisation citoyenne. »

Pour compléter cette intervention de Cedrick Aundu, Jean-Michel Brun rappelle que s’il est vrai que les réseaux sociaux forment un système de media alternatif, il ne faut pas oublier qu’ils sont aussi utilisés par les adversaires. C’est pourquoi, on peut dire que produire du contenu, c’est bien, mais cela ne suffit pas, il faut aussi faire du community management et savoir se servir des algorithmes, car les adversaires investissent beaucoup dans les medias sociaux. En France par exemple, les oligarques milliardaires qui possèdent aujourd’hui la quasi-totalité des medias mainstream investissent maintenant dans les réseaux sociaux. Il faut donc être vigilants, il faut être nombreux.

Abbas Abassov, directeur exécutif du Groupe d’initiative de Bakou, a répondu à quelques questions et a conclu la séance :

« La première question concerne les suites que nous pouvons donner à cette discussion. Je voudrais d’abord souligner que chaque action ou activité doit relever du droit international.

Chaque activité doit être cohérente et constructive. Je vous invite à présenter constamment des rapports à toutes les organisations intergouvernementales concernées et à leurs institutions. Il faut construire une stratégie de communication solide pour transmettre directement les réalités, les conséquences dans vos pays, les conséquences du colonialisme dans vos pays. À vous d’élaborer un plan, un plan de travail sur les réparations.

Et je crois fermement que cela donnera des résultats car nous avons plusieurs fois présenté des rapports au Comité des droits de l’homme, au Conseil des droits de l’homme, concernant les problèmes dans les régions colonisées par la France. Nous avons donc obtenu des résultats suffisamment positifs en ce qui concerne, par exemple, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, ce n’est qu’un exemple, mais je crois qu’il faut construire ses activités de manière très cohérente et constructive.

Je pense qu’en ce qui concerne les réparations, nous devons créer une nouvelle plateforme, où dans laquelle nous allons nous impliquer. Nous devons présenter des preuves à la communauté internationale.

Je peux énumérer de nombreuses actions que nous devrions entreprendre comme prochaines étapes, comme préparer des rapports à présenter aux Nations Unies et au Comité des droits de l’homme. Nous devons également organiser régulièrement des événements internationaux dédiés aux questions de réparation et de compensation.

Nous devons également présenter des preuves provenant de ces territoires tels que la République démocratique du Congo, le Rwanda, le Burundi.

Ensemble, nous pouvons élaborer un plan stratégique ou un plan de travail pour obtenir des réparations. Nous sommes ouverts aux idées, nous sommes ouverts aux suggestions. Nous sommes ouverts à la création d’une nouvelle plateforme sur les réparations. Nous sommes prêts à partager nos meilleures pratiques.

Nous avons d’ailleurs déjà avancé sur un certain nombre de projets. Nous avons créé un musée du Colonialisme en ligne, avec une bibliothèque contenant un grand nombre de documents sur les conséquences du colonialisme dans les pays africains des Caraïbes et de la région Pacifique. Ce musée en ligne sera ouvert au public dès l’an prochain. Nous sommes bien entendu demandeurs d’informations supplémentaires, de documents supplémentaires de votre part.

Une autre question porte sur la création du Groupe d’Initiative de Bakou. Je dois souligner que la décision de création du Groupe d’Initiative de Bakou a été prise par les représentants des mouvements nationalistes et indépendantistes impliqués dans le processus de concession de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, de Guadeloupe, de la Martinique et de la Guyane française. Ils ont décidé de créer une telle ONG internationale parce que, sous la présidence de l’Azerbaïdjan du mouvement des non-alignés, ces territoires ont participé à tous les sommets et conférences consacrés à la décolonisation. Ils ont naturellement pensé que Bakou pourrait être le centre et la capitale des dialogues sur la colonisation.

En conclusion de cette discussion, je dirai que, , comme je l’ai mentionné à plusieurs reprises, nous sommes ouverts à une nouvelle collaboration et coopération avec les peuples du Congo, de la République Démocratique du Congo, du Rwanda et du Burundi.
Je crois fermement qu’avec nos efforts mutuels, nous pouvons mener des actions et des activités constructives contre la politique néocoloniale de la Belgique.
Je suis convaincu que nous pouvons obtenir des résultats suffisamment bons pour obtenir des réparations. C’est difficile, c’est long, mais il faut bien commencer.

Le Groupe d’Initiative de Bakou, continuera à soutenir toutes les luttes pour le respect du droit international contre la politique coloniale et néocoloniale. Votre approche et votre lutte sont justes et s’inscrit dans le droit international. Ainsi, le Groupe d’Initiative de Bakou sera avec vous dans votre lutte contre la politique néocoloniale de la Belgique et pour obtenir des compensations et réparations. »

Jean-Michel Brun a conclu le forum par une courte intervention :

« Je voudrais ajouter quelquechose à ce qu’a dit Abbas sur le Groupe d’Initiative de Bakou. L’Azerbaïdjan a accepté avec enthousiasme d’accueillir cette initiative pour une raison simple : l’Azerbaïdjan est l’un des pays les plus multiculturels du monde, et peut-être le pays le plus multi-culturel quand on le rapporte à sa superficie. Le respect des cultures, des traditions, des langues locales, fait partie de l’ADN de ce pays. Ensuite, l’Azerbaïdjan a été victime, pendant presque trente ans, de l’occupation du cinquième de son territoire ar u pays voisin, et cela a été vécu comme une forme de colonisation. Enfin, Monsieur Abbasov a parlé du f-droit international, et quatre résolutions de l’ONU ont réaffirmé la souveraineté due l’Azerbaïdjan sur sa province du Karabakh et a demandé le départ des forces d’occupation. On comprend alors qu’il soit particulièrement sensible à ce problème.

Nous pouvons par conséquent remercier chaleureusement Monsieur Abbas Abbasov, directeur exécutif du Groupe d’initiative de Bako, pour avoir organisé ce débat tout à fait essentiel. Je voudrais juste conclure en deux mots : je pense que le temps n’est plus celui des regrets, mais celui de la construction. Le Congo n’est plus une blessure, il est une promesse.

C’est à nous tous, congolais et non congolais, de tenir cette promesse. Y arriverons-nous ? Oui, assurément. Dans combien de temps ? Cela sera-t-il difficile ? Là n’est pas la question. Je rappellerai simplement la maxime de Guillaume d’Orange : « Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer »

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