LES PRISONS EN FRANCE : UN NOUVEAU RECORD HISTORIQUE DU NOMBRE DE DÉTENUS

Paris / La Gazette
Les établissements pénitentiaires français comptaient, au 1 er août 2022, 71 819 détenus pour 60 719 places opérationnelles, soit une densité carcérale de 118,3 % contre 109,5 % il y a un an. En 2023, ce sont désormais 73 162 personnes incarcérées pour 60.867 places opérationnelles. Un nouveau record historique que la France vient de battre au 1er mai 2023 dernier. On compte plus de 2000 matelas au sol, en hausse de 14 % sur l'année et le taux de surpopulation explose en maison d'arrêt avec une densité moyenne de 142 %.
Face à ce mal chronique, les États généraux de la Justice avaient plaidé pour un mécanisme fixant pour chaque établissement un seuil de "sur-occupation majeure" au-delà duquel pourraient être "envisagées" des mesures de "régulation" de la population carcérale. Une proposition qui n'a pas été retenue dans le projet de loi Justice examiné en ce moment au Parlement.
"Les prisons débordent, les conditions y sont inhumaines, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme", a lancé au ministre Me Laurence Roques, présidente de la commission Liberté et droits de l'Homme du CNB, qui représente les 70 000 avocats de la profession. "Pourquoi ne faites-vous pas le choix de ce mécanisme de régulation carcérale ?"
"J'ai une responsabilité qui est politique", a répondu Eric Dupond-Moretti. "Il y a 73 000 détenus et 60 000 places. Si vous voulez qu'il n'y ait plus de surpopulation carcérale là tout de suite, il faut que je libère 13 000 détenus". "Si je fais ça", a-t-il poursuivi, "j'offre à l'extrême droite un cadeau inespéré", car "la société française n'est pas prête à ce qu'on libère 13 000 personnes". "Donc qu'est-ce qu'on fait ? Je construis des places de prison", a-t-il dit. 15 000 places supplémentaires sont attendues d'ici 2027. "Certains me disent plus vous en construisez, plus on va les remplir. Ah bon mais je fais quoi alors ?... Si vous avez la solution, je prends. Je note tout de suite, je mets en œuvre".
Le ministre a ensuite rappelé que le budget consacré à la rénovation des établissements pénitentiaires avait "doublé" par rapport à "quand la gauche était au pouvoir", et que le nombre d'offres de TIG (travail d'intérêt général) avait également "doublé". Il a noté que les avocats "ne plaidaient pas" assez cette alternative à la peine de prison, dont les magistrats peinent également toujours à se saisir. "Ça ne fonctionne toujours pas bien" mais on a "mis un certain nombre de choses en place", a-t-il conclu.
En 2023, dix nouveaux établissements actuellement en voie d’achèvement, représentant 1 958 places, devraient être livrés. Au total, vingt-quatre établissements, soit la moitié de la prévision initiale, devraient être opérationnels en 2024.
Ce mal chronique des prisons françaises avait déjà valu à la France une condamnation devant la Cour européenne des droits de l’homme en janvier 2020.
Illustration :Ministère de la justice