LE PATRIMOINE ARCHITECTURAL DE BAKOU : LA MAISON DE MAMMAD SADIKH UN REGARD HISTORIQUE SUR UN JOYAU DU DEBUT DU XXᵉ SIECLE
Au début du XXᵉ siècle, en plein boom pétrolier, Bakou connut un véritable âge d’or architectural. Profitant de la richesse soudaine des industriels du pétrole, la ville vit s’élever de somptueux hôtels particuliers, immeubles locatifs et bâtiments administratifs inspirés des plus belles traditions européennes. Leurs façades richement décorées de stucs, arches, sculptures et mosaïques reflétaient à la fois le goût raffiné et les ambitions de la nouvelle élite bakinoise. Ces édifices demeurent aujourd’hui les témoins silencieux d’une époque où le pétrole transforma Bakou en l’une des cités les plus riches et élégantes de l’Orient.
La rue Bashir Safaroglu, un musée d’architecture à ciel ouvert
Parmi les artères emblématiques de cette époque figure l’ancienne rue Kamenistaïa, connue aujourd’hui sous le nom de rue Bashir Safaroglu. Elle s’étend de l’actuelle rue Abdullah Shaig jusqu’à la rue Rashid Behbudov. Autrefois surnommée Amshari Palani (“le quartier des Amsharis”) car elle abritait une importante communauté venue du sud de l’Azerbaïdjan et d’Iran.
La partie nord de la rue, plus modeste, se composait de maisons d’un étage appartenant à des familles de travailleurs. En revanche, plus on s’approchait du centre-ville, plus l’architecture gagnait en expressivité et en richesse, avec des bâtiments résidentiels de deux ou trois étages formant un ensemble urbain harmonieux et pittoresque.
La Maison de Mammad Sadikh : élégance, symétrie et raffinement
Parmi ces chefs-d’œuvre, l’un des plus remarquables est la Maison de Mammad Sadikh, construite en 1913. Ce bâtiment majestueux se distingue par ses formes monumentales et l’équilibre harmonieux de sa façade, réalisée dans un style classique à l’européenne. Il illustre parfaitement la manière dont les architectes de l’époque savaient allier confort résidentiel, fonctionnalité et raffinement esthétique.
La façade, d’une symétrie rigoureuse, présente des rangées régulières de fenêtres élancées et de balcons soigneusement alignés, conférant à l’édifice une impression de hauteur et de grandeur. Les détails décoratifs sont d’une richesse exceptionnelle : des frontons ornés de motifs végétaux surmontent les fenêtres du deuxième étage, tandis que des corniches moulurées séparent élégamment les niveaux.
Les mascarons et balcons : les joyaux du décor
Les mascarons, ces visages sculptés d’inspiration humaine ou mythologique, retiennent particulièrement l’attention. Ils ne sont pas de simples ornements : ils confèrent à la façade une âme et une personnalité, affirmant le caractère unique de la demeure.
Les balcons en fer forgé, quant à eux, ajoutent une touche d’élégance artistique à la composition. Leurs formes ajourées et délicates animent la façade tout en remplissant une fonction pratique. L’ensemble est couronné d’un attique orné de motifs décoratifs et de la date de construction, renforçant la monumentalité de l’édifice.
Un témoin précieux de l’âge d’or de Bakou
La Maison de Mammad Sadikh incarne à merveille l’architecture résidentielle du début du XXᵉ siècle à Bakou, époque durant laquelle les motifs européens furent largement adoptés tout en conservant une identité régionale forte grâce à l’usage de matériaux locaux et de formes traditionnelles.
Aujourd’hui, ces demeures constituent le “fonds d’or” du patrimoine architectural de Bakou. Protégées par l’État, elles forment un lien essentiel entre le passé et le présent, rappelant à chaque passant que la capitale de l’Azerbaïdjan n’est pas seulement une métropole moderne, mais aussi une ville-musée, riche de son héritage culturel et artistique.