COUP D'ÉTAT AU NIGER : LA CEDEAO ANNULE SA RÉUNION ALORS QUE LE PARLEMENT PRÉVOIT DE RENCONTRER LES PUTSCHISTES

Paris / La Gazette
La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a annulé une réunion de crise sur le Niger qui était prévue pour samedi, le parlement de l'organisation ayant déclaré qu'il enverrait une délégation pour rencontrer les dirigeants du coup d'État dans le pays.
L'organisation régionale avait approuvé la mise en place d'une force militaire pour rétablir le président élu Mohamed Bazoum, qui avait été renversé par des membres de sa garde le 26 juillet.
Les chefs d'état-major des États membres de l'Union ouest-africaine devaient participer à une réunion samedi à Accra, la capitale ghanéenne, mais ils l'ont ensuite suspendue pour une durée indéterminée pour des « raisons techniques ».
Des sources ont indiqué que la réunion avait été organisée à l'origine pour informer les dirigeants de l'organisation des « meilleures options » pour l'activation et le déploiement de la force en attente.
« L'option militaire sérieusement envisagée par la CEDEAO n'est pas une guerre contre le Niger et son peuple, mais une opération de police contre les preneurs d'otages et leurs complices », a déclaré samedi le ministre nigérien des Affaires étrangères, Hassoumi Massaoudou.
La CEDEAO est déterminée à mettre fin à la sixième prise de pouvoir militaire dans la région en seulement trois ans. Elle a interrompu les transactions financières et l'approvisionnement en électricité et a fermé les frontières avec le Niger, pays enclavé, bloquant ainsi les importations indispensables à l'un des pays les plus pauvres du monde.
Des milliers de partisans du coup d'État se sont rassemblés vendredi à Niamey, la capitale du Niger, pour protester contre le projet de la CEDEAO d'envoyer des troupes.
Les manifestants se sont rassemblés près d'une base militaire française à la périphérie de Niamey en criant « A bas la France, à bas la CEDEAO ».
Les nouveaux dirigeants du Niger ont accusé la France, ancienne puissance coloniale et proche alliée de M. Bazoum, d'être à l'origine de la position intransigeante de la CEDEAO.
De nombreux manifestants ont brandi des drapeaux russes et nigériens et ont crié leur soutien au nouvel homme fort du pays, le général Abdourahamane Tiani.
La France a environ 1 500 soldats au Niger.
Elle est confrontée à une hostilité croissante dans le Sahel et a retiré ses forces du Mali et du Burkina Faso voisins l'année dernière.
Les nouveaux dirigeants du Niger ont annulé les accords de défense avec la France la semaine dernière, tandis qu'une manifestation hostile devant l'ambassade de France à Niamey le 30 juillet a incité Paris à évacuer ses ressortissants.
L'Union européenne et l'Union africaine avaient déjà tiré la sonnette d'alarme vendredi pour M. Bazoum, mais son entourage a indiqué samedi qu'il avait pu voir un médecin.
M. Bazoum « a eu la visite de son médecin aujourd'hui », a déclaré à l'AFP un membre de son entourage, ajoutant que le médecin avait également apporté de la nourriture pour M. Bazoum, sa femme et son fils. « Il va bien, compte tenu de la situation », a ajouté cette source.
Tandis que le responsable des droits de l'homme de l'ONU, Volker Turk, a déclaré que les conditions de détention de M. Bazoum « pourraient s'apparenter à un traitement inhumain et dégradant, en violation du droit international des droits de l'homme ».
La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a averti que « les putschistes devront faire face à de lourdes conséquences s'il arrive quoi que ce soit » à M. Bazoum ou à sa famille.
Le haut diplomate américain Antony Blinken s'est dit « consterné » par le refus de l'armée de libérer la famille de M. Bazoum en guise de « démonstration de bonne volonté ».
Sous la pression d'une cascade de coups d'État parmi ses membres, la CEDEAO avait précédemment lancé un ultimatum de sept jours aux putschistes pour qu'ils remettent M. Bazoum au pouvoir.
Mais les généraux ont défié le délai, qui a expiré dimanche sans qu'aucune mesure n'ait été prise.
Les putschistes ont depuis nommé un nouveau gouvernement, qui s'est réuni pour la première fois vendredi.