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UN HÉROS AZERBAÏDJANAIS DU MOUVEMENT DE RÉSISTANCE FRANÇAIS : ARMED MICHEL

3 Juillet 2025 08:40 (UTC+01:00)
UN HÉROS AZERBAÏDJANAIS DU MOUVEMENT DE RÉSISTANCE FRANÇAIS : ARMED MICHEL
UN HÉROS AZERBAÏDJANAIS DU MOUVEMENT DE RÉSISTANCE FRANÇAIS : ARMED MICHEL

Paris / La Gazette

Les héros de la Seconde Guerre mondiale occupent une place irremplaçable dans l’histoire de l’Azerbaïdjan. Leur courage et leur sacrifice sont une légende qui inspire les générations modernes.

Plus de 600 000 fils et filles de l’Azerbaïdjan ont participé à la guerre. Autrement dit, une personne sur cinq en Azerbaïdjan a été appelée sous les drapeaux. Le dixième d'entre aux ne revint jamais de la guerre. En même temps, des milliers d’Azerbaïdjanais vivant dans d’autres républiques de l’URSS ont également participé au conflit.

Les noms de Həzi Aslanov, double héros de l'Union soviétique, ainsi que d’Israfil Mammadov, Mehdi Huseynzade, Geray Asadov, Qafur Mammadov, Huseynbala Aliyev, de l'aviatrice Zuleikha Seyidmammadova, de la tireuse d’élite Ziba Salimova, du capitaine de navire Shovkat Salimova et d’autres compatriotes sont gravés dans l’histoire. Rashid Majidov a hissé le drapeau soviétique sur la porte de Brandebourg. Dans la lutte contre le fascisme, 121 citoyens de la RSS d’Azerbaïdjan ont reçu le titre de Héros de l’Union soviétique, et 30 ont été décorés de toutes les trois classes de l’Ordre de la Gloire. Les Azerbaïdjanais ont également reçu des ordres et des médailles de la France, de l’Italie et d’autres pays.

Les fils de l’Azerbaïdjan ont également participé activement aux mouvements partisans et de résistance contre le fascisme. Ils ont combattu vaillamment dans les rangs des détachements partisans en Ukraine, en Biélorussie, dans le Caucase du Nord, dans les pays baltes, en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Hongrie, en Yougoslavie, en Italie ainsi que dans le mouvement de résistance antifasciste en France.

Pendant la guerre, plus de trois mille Azerbaïdjanais ont participé au mouvement de résistance dans les pays d’Europe occidentale, notamment en France. Parmi eux, le nom d’Ahmadiyya Jabrayilov, qui a combattu dans la Résistance française, est resté particulièrement gravé dans les mémoires. Ahmadiyya Jabrayilov (1920-1994) fut un partisan azéri actif dans la lutte contre l’Allemagne nazie durant la Seconde Guerre mondiale. Son courage dans la résistance française, ainsi que sa participation aux opérations de renseignement et de sabotage contre les Allemands au sein des groupes de partisans, ont fait de lui un héros. Sous le nom de « Armed Michel » (ou Michel Akmed, ou Xargo), Ahmadiyya Jabrayilov a joué un rôle actif dans la Résistance, et ses services ont été hautement appréciés par l’État français. Il a reçu diverses décorations et médailles, y compris des ordres de la Résistance française. Le fait qu’il soit Azerbaïdjanais est une source de fierté tant pour le peuple d’Azerbaïdjan que pour les peuples de l’ex-URSS. Il est reconnu comme l’un des rares Azerbaïdjanais à avoir participé au mouvement de résistance.

Le 20 août 1944, dans le Paris libéré, le général Charles de Gaulle rencontre Ahmadiyya Jabrayilov. Le 28 août, Ahmadiyya rejoint la 3e brigade formée à Montauban et participe aux combats dans la région de Vozj et en Alsace.
Le 1er mars 1945, il intègre le 4e escadron de la 3e brigade. En plus de plusieurs missions, Ahmadiyya Jabrayilov a fait sauter des voies ferrées, empêchant ainsi l’ennemi de transférer des milliers de Français dans des camps de prisonniers en Allemagne pour y être exploités. Il a sauvé près de 500 enfants français destinés à ces camps. Il détruisait des ponts, incendiait des dépôts allemands et des maisons occupées par des officiers fascistes. Sous sa direction, des chars ennemis ont été détruits dans le centre de la ville de Lyon. En récompense de ces opérations dangereuses menées avec succès, Maurice Thorez, secrétaire général du Parti communiste français, lui offrit un pistolet.

Le 16 mars, il est démobilisé de la 3e brigade. En mai 1945, il participe à nouveau aux combats dans la région de Vozj et en Alsace au sein de la Première Armée française.
En 1946, Ahmadiyya prend la ferme décision de retourner dans son pays natal. La France reconnaît pleinement ses exploits militaires et le décore de plusieurs médailles et ordres, notamment de la « Médaille militaire » pour sa bravoure personnelle (cette médaille donne au soldat le droit de marcher devant un général lors des parades militaires).
Le général Charles de Gaulle, ainsi que le peuple et l’État français, n’ont jamais oublié les services du partisan Ahmadiyya Jabrayilov. Le gouvernement français lui offre une petite usine automobile à Dijon. De plus, Ahmadiyya Jabrayilov est nommé à un poste de responsabilité dans le bureau du président Charles de Gaulle. Ce dernier lui remet un certificat de citoyenneté française lui permettant d’utiliser gratuitement tous les moyens de transport du pays. Dix jours plus tard, l’usine automobile qu’il dirige reçoit le nom d’« Armed Mişel ».
Le 25 novembre 1946, grâce à l’aide de Charles de Gaulle, Ahmadiyya retourne en URSS. En 1947, il épouse Madame Suraiya, et de cette union naissent sept enfants entre 1948 et 1962.
En 1966, lors d’une visite en URSS, le président français Charles de Gaulle exprime le souhait de voir Ahmadiyya Jabrayilov, qui est alors invité à Moscou. Après avoir terminé ses études à l’Institut d’Agriculture en 1970, il travaille comme agronome en chef dans la ferme collective Nérimanov du district de Chaké. En 1971, il est décoré de l’Ordre du Drapeau rouge du travail.
En 1972, 1975 et 1982, il obtient la permission de visiter les lieux où il a combattu. Il se rend à Montauban, Rodez, Toulouse, Albi, ainsi qu’à Paris, Bordeaux, Strasbourg, Lyon, Dijon et Marseille, où il rencontre d’anciens compagnons d’armes. Lors de son voyage de 1975, il est reçu au Sénat français par le sénateur Jacques Duclos, qui lui remet une médaille commémorative de cette rencontre.

En 1976, il est décoré de l’Ordre de la Révolution d’Octobre pour sa participation à la guerre. En 1977, René Chambard, qui a combattu aux côtés d’Ahmadiyya Jabrayilov dans la résistance française dans les départements du Tarn et de la Garonne, vient en URSS et rencontre Ahmadiyya Jabrayilov.

En 1986, Ahmadiyya Jabrayilov reçoit cinq décorations françaises : la Croix de Guerre, la Croix de la Valeur Militaire, la Médaille de la Résistance, la Médaille du Mérite pour Courage et la Médaille pour Blessure. En 1990, il est invité à Paris pour participer aux cérémonies du centenaire de la naissance de Charles de Gaulle. Le 6 janvier 1994, René Roussel, membre du Front national de la résistance et des Francs-tireurs et partisans (FTP), lui remet un document attestant de sa participation à la Résistance française.

Ignorant son décès, le gouvernement français lui attribue en 1995 une pension d’honneur et des médailles commémoratives à l’occasion du 50ème anniversaire de la victoire sur le fascisme. En octobre 1995, lors de l’anniversaire de sa mort, une statue en bronze est érigée sur sa tombe. Le 15 octobre 1998, Ahmadiyya Jabrayilov reçoit à titre posthume un Diplôme de Reconnaissance pour sa participation aux combats pour la liberté de la France. La même année, René Chambard, compagnon de lutte d’Ahmadiyya, rend visite à sa famille à Shaki.

Le 11 août 2020, le président de la République d’Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, signe un décret sur la célébration du 100ème anniversaire d’Ahmadiyya Jabrayilov.

Plusieurs œuvres ont été consacrées à Ahmadiyya Jabrayilov, notamment « En mission », « Armed Mişel », « Hargo », entre autres. Des films documentaires tels que « Héros de France », « Le héros azéri de France », « Il était Hargo » ont également été réalisés. Des discussions à son sujet ont lieu lors de différents événements, dans des écoles et universités.

Son fils Mikayil Jabrayilov (1952-1990) a continué l’héritage héroïque de son père en tombant lui aussi pour la patrie. Par décret présidentiel du 6 juin 1992 (n° 831), il a été décoré à titre posthume du titre de « Héros National d’Azerbaïdjan».

La grande majorité des Azerbaïdjanais ayant participé à la Seconde Guerre mondiale ont fait preuve d’un grand dévouement au combat. Le courage et la foi inébranlable qu’ils ont manifestés pendant la guerre les ont transformés en héros de l’histoire de l’Azerbaïdjan et du monde en général. Ce sont précisément les petits-enfants de ces héros qui, lors de la guerre patriotique de 44 jours, ont combattu héroïquement pour rétablir l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Azerbaïdjan. Le peuple azerbaïdjanais, lié à son passé et à ses héros, lutte pour un État fort. Ce processus revêt une grande importance en termes de préservation des traditions historiques et de transmission à la génération future.

Fuad Huseynzadeh, président de l’Union publique de soutien des journalistes à l’activité diasporique

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