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PRÉSIDENTIELLES 2022 : YANNICK JADOT, LE CANDIDAT DE LA CONTRADICTION ÉCOLOGIQUE

3 Novembre 2021 23:03 (UTC+01:00)
PRÉSIDENTIELLES 2022 : YANNICK JADOT, LE CANDIDAT DE LA CONTRADICTION ÉCOLOGIQUE
PRÉSIDENTIELLES 2022 : YANNICK JADOT, LE CANDIDAT DE LA CONTRADICTION ÉCOLOGIQUE

La Gazette / Émile Mila

Désigné candidat pour l'élection présidentielle française de 2022 à l'issue des primaires d'Europe Écologie Les Verts (EELV) qui se sont déroulées en septembre dernier, l'eurodéputé Yannick Jadot, victorieux de justesse face à Sandrine Rousseau lors de ces primaires (51 % contre 49 %), porte l'ambition de placer l'écologie et le réchauffement climatique au centre des débats durant la campagne présidentielle ainsi que du champ d'action gouvernementale s'il venait à être élu.

Crédité de 6 % à 9 % des intentions de vote selon les sondages et se positionnant deuxième derrière Jean-Luc Mélenchon, leader de La France Insoumise (LFI), au sein d'une gauche divisée, voire éparpillée, le candidat écologiste peine notamment à séduire l'électorat qualifié de populaire alors qu'il semble accumuler les gaffes et fait montre d'incohérence. Il se place sixième ou septième parmi les candidats aux scrutins présidentiels de 2022, selon les sondages, se disputant les intentions de vote du maigre électorat dit de la « gauche bourgeoise », avec Anne Hidalgo, maire de Paris et candidate désignée du Parti Socialiste (PS) à l'Élysée.

L'impossible cohérence d'un discours ambigü

Laissant planer nombre de doutes sur les méthodes, mécanismes et financements des projets et réformes écologiques qui seraient entrepris par son gouvernement, dans le cas de son éventuelle accession à la tête de l'Exécutif français, le candidat d'EELV ne parvient pas plus à convaincre sur son réalisme économique ou sur sa cohérence du point de vue idéologique.

Interrogé le 29 octobre sur BFMTV/RMC par le journaliste Jean-Jacques Bourdin, Yannick Jadot a d'abord déclaré être "favorable à la suppression de l’abattage rituel" en France. Le journaliste lui a alors demandé : "Plus de viande casher ou halal ?". Ce à quoi Jadot a répondu : "j’entends ces traditions, mais il n’y a aucune tradition qui justifie de faire souffrir les animaux".

Suite aux nombreuses réactions sur les réseaux sociaux face à sa volonté exprimée d'interdire l'abattage rituel dans l'Hexagone, le candidat EELV a ensuite rétropédalé. Dans une publication sur Twitter, Jadot a écrit qu'il n'y avait pas "pas de malentendu sur l’abattage rituel. Chaque religion peut avoir ses traditions, mais personne ne peut s’affranchir des règles de bien-être animal, en particulier de l’étourdissement », essayant de trouver ce qui semblerait être un impalpable juste milieu entre deux pensées éthiques, l'une à caractère idéologique et l'autre, religieux.

Une rhétorique falsifiée de la défense des minorités

Constituant le noyau des propositions du candidat EELV, l'écologie est le domaine dans lequel le parti veut figurer comme valeur sûre alors qu'il s'auto-octroie le rôle de détenteur d'un monopole idéologique et politique qui fut autrefois réel en France.

Yannick Jadot, figure de proue du mouvement, n'hésite pas à multiplier les déclarations percutantes, qui se veulent empreintes d'une éthique moralisante,, alors qu'elles le conduisent à adopter des positions qui entrent en contradiction directe avec son alpha et oméga écologique.

Par exemple, en soutenant, à l'automne dernier, les colons arméniens de la région géographique du Karabakh, en Azerbaïdjan, Jadot se rendait-il compte qu’il justifiait un véritable écocide régional ?

Lorsque la seconde guerre du Karabagh a éclaté à l'automne dernier entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan dans les régions azerbaïdjanaises occupées alors depuis 28 ans par les forces séparatistes liées au pouvoir d'Erevan, l'eurodéputé écologiste signait, avec 172 autres personnalités politiques françaises, une tribune en faveur de l'Arménie, en contravention directe avec les six résolutions du Conseil de Sécurité de l'ONU et de l'Assemblée générale des Nations Unies , lesquelles reconnaissaient de manière indiscutable la souveraineté azerbaïdjanaise sur ces régions colonisées et appelaient les forces arméniennes à respecter l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan et à s'en retirer.

Le soutien aux Arméniens du Karabagh : que fait-on de l'écologie ?

Ignorant ou feignant d'ignorer que la guerre de 44 jours (du 27 septembre au 9 novembre 2020) a été le fait de l'agression arménienne, Yannick Jadot semble également absoudre les massacres perpétrés par les Arméniens (forces armées et colons) tuant des milliers de civils azéris durant la première guerre du Karabakh (1988-1994) et forçant plus de 700 000 d'entre eux à migrer vers d'autres régions du pays.

Sur la question des minorités, Yannick Jadot ignore-t-il que 300 000 Azéris ont été expulsés d'Arménie avant la première guerre du Karabakh ? Cela afin qu’Erevan ait les mains libres pour exploiter pleinement à son profit cette rhétorique des droits des minorités. Cela alors même que Bakou est félicitée par les institutions internationales pour son respect des minorités ethniques et confessionnelles du pays.

Au-delà de cet aveuglement sincère ou feint pour des faits pourtant indiscutables, le candidat écologiste semble surtout fau-ire le silence sur l'interminable liste des crimes écologiques commis par les Arméniens (forces armées et colons) avant, pendant, et après les deux guerres du Karabagh, c'est-à-dire du début des années 1990 jusqu'en 2021.

Un aperçu aussi bref que possible des écocides arméniens

En 2004, l'organisation des Nations Unies (ONU), prévenait déjà des dangers écologiques qui pesaient sur la région du Caucase du Sud à travers les conflits persistant en Géorgie et entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. L'organisme international mettait clairement en cause les autorités arméniennes dans les désastres écologiques en cours et à venir dans la région.

Depuis plusieurs décennies, l'Azerbaïdjan essaie de se faire entendre par la communauté internationale sur les crimes écologiques commis par Erevan et ses conséquences dévastatrices sur l'environnement en Azerbaïdjan.

L'un des exemples qui commence désormais à être connu du public est la pollution de la rivière Oktchoutchay [2] par l'usine de cuivre-molybdène de Gajaran-Zanguezour et l'usine de traitement du minerai de fer de Gafan, toutes deux situées en Arménie. L'absence de réaction des autorités arméniennes à l'appel de Bakou pour cesser cet écocide, ne semble pourtant pas préoccuper le candidat écologiste Yannick Jadot.

Le bureau du Procureur général de Azerbaïdjan annonçait en juin dernier avoir ouvert une procédure pénale contre l'Arménie pour le désastre écologique engendré par les trois décennies d'occupation de la région du Karabakh et des sept districts adjacents.

L'agence internationale de presse Reuters [3] rapportait en novembre 2020 que les Arméniens qui se retiraient des régions restituées mettaient à feu les maisons et toute la végétation autour des villages, des champs et vergers aux forêts .

« Ils seront déjà là demain matin. Les Azéris. On les en****. Qu'ils vivent ici, s'ils le peuvent », déclarait un Arménien interrogé par Reuters alors qu'il incendiait une maison azerbaïdjanaise qu'il avait fait sienne au cours des décennies de colonisation.

Incendies forestiers provoqués par les Arméniens dans la région de Kelbajar restituée à l'Azerbaïdjan

L'agence de presse précisait que « les Arméniens recourent à une politique de la terre brûlée alors que l'heure approche pour la [rétro-]cession du territoire à l'Azerbaïdjan dans le cadre d'un accord de paix négocié par la Russie ». Ce qui n'était pas une première , alors que plusieurs rapports de Bakou en 2016 et 2019 [4] avertissaient la communauté internationale que « Les territoires des régions d'Aghdam, Fizuli, Jabrayil, Tartar et Khojavend situés sur la ligne de contact sont délibérément incendiés par les occupants arméniens. Les incendies ont couvert des dizaines de milliers d'hectares sous contrôle arménien, mais se sont également propagés à d'autres régions, causant de graves dommages à l'environnement et à la faune. À la suite d'incendies réguliers par les Arméniens depuis 2006, plus de 110 000 hectares de terres fertiles ont été détruits, endommageant gravement l'environnement et la faune » et provoquant la disparition de dizaines d'espèces animales et végétales endémiques. »

Dans une résolution (2085) intitulé « Les habitants des régions frontalières de l'Azerbaïdjan [à l'Arménie] sont délibérément privés d'eau », l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) dénonçait en 2016 un crime écologique commis par l'Arménie.[5]

« L'Assemblée considère que la création délibérée d'une crise environnementale artificielle doit être considérée comme une « agression environnementale » et considérée comme un acte hostile d'un État envers un autre visant à créer des zones de catastrophe écologique et à rendre impossible une vie normale pour la population concernée », notait l'APCE.

« Elle déplore que l'occupation par l'Arménie du Haut-Karabakh et d'autres régions adjacentes de l'Azerbaïdjan crée des problèmes humanitaires et environnementaux similaires pour les citoyens azerbaïdjanais vivant dans la vallée du Bas-Karabakh », concluait l'autorité européenne.

Un fait de plus qui semble avoir manqué à l'attention du candidat écologiste à la présidentielle française, Yannick Jadot.

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Notes :

1. « Environmental issues could worsen conflicts in southern Caucasus – UN report » - ONU – 22 octobre 2004
https://news.un.org/en/story/2004/10/118772-environmental-issues-could-worsen-conflicts-southern-caucasus-un-report

2. « Le photojournaliste français Reza Deghati qualifie la pollution de la rivière «Okhtchoutchay» de catastrophe écologique » – La Gazette – 28 août 2021
https://www.lagazetteaz.fr/news/societe/6932.html

3. « Armenians set fire to homes before handing village over to Azerbaijan » (en anglais) – Reuters – 14 novembre 2020
https://www.reuters.com/article/us-armenia-azerbaijan-village-idUSKBN27U0FQ

4. Rapports de l'Azerbaïdjan sur les activité illégales de l'Arménie dans les territoires occupés (2016 et 2019)
https://geneva.mfa.gov.az/files/MFA_Report_on_the_occupied_territories_1.pdf
http://eco.gov.az/frq-content/plugins/pages_v1/entry/20190823174831_88765600.pdf

5. « Inhabitants of frontier regions of Azerbaijan are deliberately deprived of water » (en anglais) - Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe
https://assembly.coe.int/nw/xml/XRef/Xref-XML2HTML-EN.asp?fileid=22429&lang=en

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