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Paris / La Gazette

Le président Recep Tayyip Erdogan a insisté dimanche que toute initiative qui isole la Russie a peu de chances d'être durable et a appelé Moscou à ne pas être « marginalisée » dans les discussions visant à relancer un accord clé pour l'exportation de céréales ukrainiennes via la mer Noire.

M. Erdogan a déclaré que la question du déblocage de l'initiative sur les céréales de la mer Noire avait été discutée en détail lors du sommet du G-20 qui s'est tenu ce week-end en Inde, en l'absence du président russe Vladimir Poutine et du président chinois Xi Jinping.

« Aucun processus qui marginalise la Russie sur l'initiative céréalière de la mer Noire ne sera viable », a déclaré le président Erdogan lors d'un point de presse après la réunion à New Delhi.

L'accord conclu sous l'égide des Nations Unies et de la Turquie a permis à l'Ukraine d'exporter des céréales et d'autres produits de base à partir de trois ports de la mer Noire, malgré la guerre qui dure 18 mois.

L'accord est vital pour l'approvisionnement alimentaire mondial, en particulier en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. L'Ukraine et la Russie sont d'importants fournisseurs de blé, d'orge, d'huile de tournesol et d'autres produits dont dépendent les pays en développement.

Dans le cadre du pacte, environ 33 millions de tonnes de céréales ont été livrées sur les marchés internationaux, s'est souvenu M. Erdogan.

« Grâce à cette initiative, nous avons empêché la crise alimentaire de s'aggraver davantage », a-t-il ajouté.

Le pacte s'est effondré après que la Russie s'en est retirée à la mi-juillet, se plaignant qu'un accord parallèle promettant de lever les obstacles aux exportations russes de denrées alimentaires et d'engrais n'avait pas été respecté et que les pays dans le besoin n'avaient pas reçu suffisamment de céréales ukrainiennes.

Dans sa déclaration de samedi, le G-20 a appelé à « une mise en œuvre complète, opportune et efficace pour assurer la livraison immédiate et sans entrave de céréales, de denrées alimentaires et d'engrais/intrants » en provenance de Russie et d'Ukraine afin de répondre à la demande des pays en développement.

Les livraisons ont été entravées après l'invasion de l'Ukraine par la Russie l'année dernière, dans le cadre de ce que Moscou appelle une « opération militaire spéciale ». Les Nations unies, la Turquie et le Japon, qui préside le G7 cette année, tentent de faciliter la reprise des livraisons de céréales.

Depuis qu'elle a quitté l'accord, la Russie a attaqué à plusieurs reprises les infrastructures portuaires de l'Ukraine dans ce que Kiev considère comme une tentative cynique de nuire à ses exportations et de porter atteinte à la sécurité alimentaire mondiale.

« Nous sommes d'avis qu'il faut éviter toute mesure susceptible de troubler la paix en mer Noire et d'aggraver les tensions dans la région », a clamé M. Erdogan.

M. Erdogan a fait savoir qu'il n'était pas « désespéré » quant à la reprise de l'accord sur les céréales et a souligné que la Russie, l'Ukraine et la Turquie continueraient à discuter de l'accord.

Il a annoncé une prochaine réunion entre des représentants de la Russie, de l'Ukraine et des Nations Unies, sans préciser de date ni de lieu.

La Turquie s'est positionnée pour faciliter les négociations de paix entre les parties belligérantes. Elle s'est opposée à l'invasion russe, mais aussi aux sanctions occidentales contre Moscou.

M. Erdogan a entretenu de bonnes relations avec M. Poutine et a contribué à l'échange de prisonniers entre les parties belligérantes.

Il a appelé à plusieurs reprises les pays occidentaux à prendre en compte les demandes de la Russie.

« Nous déployons des efforts intenses pour mettre fin à la guerre entre la Russie et l'Ukraine, qui a coûté des centaines de milliers de vies », a évoqué le dirigeant turc dimanche.

« Nous avons entrepris de nombreuses démarches diplomatiques, depuis le processus d'Istanbul, qui a réuni les parties autour d'une même table, jusqu'aux échanges de prisonniers et à l'initiative de la mer Noire », a-t-il renchéri.

La Russie est disposée à envoyer gratuitement des céréales aux pays les plus pauvres, ce que favorise la Turquie, a-t-il ajouté, précisant que le Qatar avait également donné son accord.

La semaine dernière, M. Poutine a laissé entendre que Moscou était sur le point de finaliser un accord qui faciliterait les exportations gratuites de céréales de la Russie vers six pays africains, avec l'aide de la Turquie et du Qatar.

Cette proposition n'est pas envisagée comme une alternative à l'initiative de la mer Noire, a-t-il précisé.

L'accord comprendrait la fourniture d'un million de tonnes de céréales aux pays qui en ont le plus besoin, via la Turquie et avec le soutien financier du Qatar. Les céréales seront transformées dans des usines turques avant d'être expédiées vers les pays africains.