RAHMAN MUSTAFAYEV, ANCIEN AMBASSADEUR D’AZERBAÏDJAN EN FRANCE DEVIENT AMBASSADEUR EN RUSSIE

Paris / La Gazette
Le 1er octobre 2024, le président de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliyev, a officiellement confirmé la nomination de Rahman Mustafayev en tant que nouvel ambassadeur d'Azerbaïdjan en Russie.
Rahman Mustafayev n’est pas un inconnu en France puisqu’il a été en poste à Paris entre 2017 et 2022, où il a réussi à gérer l’une des situations les plus délicates pour un chef de mission diplomatique : être l’ambassadeur d’un pays en guerre, et qui plus est contre un voisin dont la diaspora française représente une force médiatique et politique considérable, et dont le nationalisme exacerbé ne lui laisserait aucun répit. Dès le déclenchement de la deuxième guerre du Karabakh le 27 septembre 2020, c’est en effet un immense chantier qui s’ouvrait devant la mission diplomatique azerbaïdjanaise en France. Elle a dû à la fois à expliquer la guerre, faire face à une classe politique hostile soutenue par des médias partisans, protéger les bâtiments de l’ambassade contre des casseurs radicalisés, et en même temps faire découvrir aux français les richesses patrimoniales, musicales, littéraires, artistiques d’un pays dont beaucoup venaient tout juste d’apprendre l’existence. Finalement, pendant ces deux dernières années, l’Azerbaïdjan a réussi à ouvrir une brèche dans le mur médiatique français et inversement dresser un rempart juridique contre les tentatives de jumelage de certaines villes françaises et « l’État » illégal du Haut-Karabakh. Cette aptitude à gérer des conditions difficiles ont certainement pesé fortement dans le choix du nouvel ambassadeur à Moscou.
Un diplomate expérimenté
M. Mustafayev est né dans une famille de diplomates. Son grand-père, Sadig Rahimov, était président du Conseil des ministres de la République socialiste soviétique d'Azerbaïdjan. En 1985, il est diplômé de l'Institut d'État des relations internationales de Moscou du ministère des affaires étrangères de l'URSS (aujourd'hui MGIMO du ministère des affaires étrangères de Russie).
De décembre 1999 à avril 2006, il est conseiller politique à l'ambassade d'Azerbaïdjan en Russie. À partir de juin 2006, il est directeur adjoint puis directeur du département Europe et Amérique du ministère des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan. Le 22 octobre 2009, R. Mustafayev est nommé ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire. Du 22 octobre 2009 au 23 juin 2017, il occupe le double poste d’ambassadeur en Grèce et en Albanie. Cette période a vu l'épanouissement des relations gréco-azerbaïdjanaises, combinant le renforcement des liens culturels avec le développement de projets gaziers entre le gouvernement d'Antonis Samaras et la République d'Azerbaïdjan. Le 23 juin 2017, Rahman Mustafayev est nommé ambassadeur d'Azerbaïdjan en France, au Saint-Siège et à Monaco.
Pendant les 5 années où l'ambassadeur Mustafayev a été en France, l'une de ses principales réalisations a été son travail visant à informer les citoyens français, malgré la pression extrême exercée sur lui par la diaspora arménienne, les lobbyistes et les publications hostiles, y compris la presse de la droite conservatrice Le Point, Le Figaro, Valeurs Actuelles. Outre l'attitude difficile de la presse française qui lui a refusé à plusieurs reprises le droit de réponse (pourtant universellement accordé aux ambassadeurs et aux représentants diplomatiques de tous les pays du monde par les normes internationales du journalisme), il a dû affronter l’attitude hostile des politiciens français convaincus, à tort sans doute, pour que la carte électorale arménienne est devenue un atout clé pour leur élection. Historien, il a publié en français « L’Azerbaïdjan entre les grandes puissances ».
Sa mission en France prend fin le 17 octobre 2022. Il est remplacé par Leyla Abdullayeva. Cette diplomate, qui s’exprime parfaitement en français, a fait notamment ses preuves en tant que porte-parole du ministère des Affaires étrangères. Par ailleurs, le choix de nommer une ambassadrice à Paris n’est pas tout à fait anodin. Face aux divers dénigrements dont l’Azerbaïdjan est victime en France, c’est une manière de rappeler que l’égalité des sexes fait partie de l’ADN de l’Azerbaïdjan où, rappelons-le, le droit de vote a été accordé aux femmes 14 ans avant la France. Mme Abdullayeva a, quant à elle, la lourde charge de gérer, dans l’opinion française, la libération totale des anciens territoires occupés de l’Azerbaïdjan.
Rahman Mustafayev est alors appelé à diriger la mission diplomatique de l'Azerbaïdjan aux Pays-Bas, où il était également le représentant de l'Azerbaïdjan auprès de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques. Bien que les Pays-Bas soient l'un des principaux alliés de la France dans la région, Rahman Mustafayev a réussi à niveler les dommages causés par la coopération des parlementaires français et néerlandais dans l'isolement de l'Azerbaïdjan au sein de la communauté politique européenne.
Au départ de Polad Bül Bül Oglu du poste d'ambassadeur d'Azerbaïdjan en Russie, Bakou cherche à s’ouvrir, dans ce pays, à de nouvelles opportunités et perspectives. Face à la nouvelle situation en Russie, en prise avec la guerre en Ukraine, l’Azerbaïdjan a besoin d’un représentant expérimenté qui a l’habitude de relever les défis. Le cursus de Rahman Mustafayev, qui parle cinq langues et a étudié dans l'université la plus prestigieuse de Russie en fait le candidat idéal. Fin connaisseur de la composante culturelle et socio-économique de la Fédération de Russie, il est parfaitement à l’aise avec les subtilités des relations entre la Russie et l'Azerbaïdjan. « Vous aimez les challenges, vous voilà servi, non ? », lui avons-nous demandé. « C’est surtout les challenges qui m’aiment ! » nous a-t-il répondu…