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LE 7ÈME FORUM INTERNATIONAL DE L'UNIVERSITÉ ADA SUR LE THÈME "FACE AU NOUVEL ORDRE MONDIAL" S'EST TENU EN PRÉSENCE DU PRÉSIDENT ILHAM ALIYEV

29 Avril 2025 09:04 (UTC+01:00)
LE 7ÈME FORUM INTERNATIONAL DE L'UNIVERSITÉ ADA SUR LE THÈME "FACE AU NOUVEL ORDRE MONDIAL"  S'EST TENU EN PRÉSENCE DU PRÉSIDENT ILHAM ALIYEV
LE 7ÈME FORUM INTERNATIONAL DE L'UNIVERSITÉ ADA SUR LE THÈME "FACE AU NOUVEL ORDRE MONDIAL" S'EST TENU EN PRÉSENCE DU PRÉSIDENT ILHAM ALIYEV

Paris / La Gazette

Le 7e Forum international de l'Université ADA sur le thème « Face au nouvel ordre mondial » s'est tenu du 7 au 10 avril 2025 à Bakou et Khankendi, en Azerbaïdjan, avec la participation du président de la République d'Azerbaïdjan Ilham Aliyev. 80 participants venus de 44 pays, dont des décideurs politiques, des universitaires et des experts de renom issus de groupes de réflexion et d'institutions universitaires de premier plan ont participé aux débats.

En répondant, longuement et complètement, comme à son habitude, aux questions des participants, le chef de l'Etat a dressé un tableau clair et sans complaisance de la situation actuelle dans le monde et dans le Caucase, et de ses développements futurs. Voici un résumé de ses principales interventions.

Khandendi, un symbole majeur de la nouvelle situation dans le Caucase.

Le forum a débuté par une visite de Khankendi, revenu au sein de son berceau historique : l’Azerbaïdjan.

« Après sa décision absolument infondée, d'un point de vue politique, historique et culturel, de créer le district autonome du Haut-Karabakh dans la région du Karabakh en Azerbaïdjan, le gouvernement soviétique a malheureusement lancé le processus qui a conduit au séparatisme agressif. » a rappelé le Chef de l’État. « La création du district autonome du Haut-Karabakh en 1923 était en réalité une bombe à retardement, qui a explosé au moment où les séparatistes, leurs sponsors et divers acteurs qui ont utilisé le conflit à leurs fins politiques en avaient besoin. Nous y avons mis fin il y a un an et demi, par une opération militaire de moins de 24 heures, qui a marqué le point final de notre bataille pour la souveraineté ».

Pour un Sud Caucase pacifié et leader

Ilham Aliyev a insisté sur le fait que, son intégrité territoriale reconquise, l’Azerbaïdjan peut se focaliser sur la qualité de ses relations internationale, et en particulier avec l’Europe, le Moyen-Orient et l’Asie :

« Concernant la coopération durable avec les pays européens, l’Azerbaïdjan a signé ou adopté la déclaration de partenariat stratégique avec nombre d’entre eux. Cette plateforme déjà établie nous permet donc de jouer un rôle important de passerelle géographique, politique, économique et de transport entre la région d’Asie centrale et l’Europe. Nous savons que l’Asie centrale suscite actuellement un vif intérêt de la part de l’Occident, qu’il s’agisse de l’Union européenne, des États-Unis ou d’autres institutions internationales. Géographiquement, l'Azerbaïdjan est un pays du Caucase du Sud, un pays de la mer Caspienne, mais en même temps, nous sommes proches de l'Asie centrale ; seule la mer Caspienne nous sépare. En matière de coopération pratique, de transport et du Corridor central, nous avons beaucoup œuvré pour construire des ponts et accroître le volume de fret. Les investissements importants dans les infrastructures de transport de l'Azerbaïdjan, notamment le port maritime, l'usine de construction navale, les installations ferroviaires et les autres infrastructures logistiques que nous avons créées aujourd'hui, sont essentiels. Nous constatons qu'année après année, un volume croissant de fret transite par l'Azerbaïdjan, non seulement en provenance d'Asie centrale, mais aussi de Chine et d'Europe vers la Chine.

On peut en dire autant de nos liens étroits avec le Moyen-Orient et les pays membres du Conseil de coopération du Golfe. L'Azerbaïdjan a établi des relations très solides, fondées sur le respect et l'intérêt mutuels. Nous travaillons déjà activement sur différents projets d'investissement. Cela peut également s'appliquer aux pays d'Asie centrale, où nous avons déjà créé plusieurs fonds d'investissement conjoints avec certains pays d'Asie centrale et certains pays du Conseil de coopération du Golfe. La création de cette synergie sera donc bénéfique pour nous tous. Il y a tout juste six mois, nous avons signé un accord important entre l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan et l'Ouzbékistan concernant un câble d'énergie verte sous la mer Caspienne. Il permettra ainsi d'exploiter les vastes ressources d'énergie verte de l'Asie centrale – dont certaines sont déjà disponibles et d'autres en cours de construction – et de s'ajouter aux vastes ressources d'énergie verte de l'Azerbaïdjan pour soutenir les pays européens en matière de sécurité énergétique. Pour l'instant, il s'agit de pétrole et de gaz, mais l'électricité sera produite à partir d'énergie verte. Il y a quelques jours, nous avons tenu à Bakou la réunion ordinaire du Conseil consultatif du Corridor gazier Sud, dont une partie de l'ordre du jour était consacrée à l'énergie verte. Ainsi, les transports, l’énergie verte, la sécurité, la stabilité et, bien sûr, les efforts conjoints pour renforcer l’État et l’indépendance de notre région sont des facteurs internationaux importants. »

Cette ouverture sur le monde, l’ensemble des pays du Caucase du Sud aurait pu en profiter. L’Azerbaïdjan et la Géorgie par exemple, ont déjà amorcé une coopération fructueuse en ce sens. Malheureusement « l’Arménie s’est privée de tout cela. En raison de la politique d’occupation et d’agression, elle s’est privée du statut de pays de transit, un pays de transit important pour les ressources énergétiques et les voies de transport de l’Azerbaïdjan. Or, tout le transit – qu’il s’agisse de pétrole, de gaz ou de marchandises – en provenance d’Azerbaïdjan passe par la Géorgie. L’Arménie aurait donc pu participer à ce processus. C'est leur faute s'ils ont mal évalué le développement futur et sacrifié leur avenir économique, leur véritable indépendance, au profit de ce rêve de « grande Arménie » » a regretté le président azerbaïdjanais. « La signature d'un accord entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie permettra, bien sûr, le début d'une coopération. Je pense que nous ne devons pas perdre de temps car, une fois de plus, concernant l'accord de paix, la balle est dans le camp de l'Arménie. »

Les leçons d’une guerre qu’on aurait pu éviter

Le récit légendaire de la « Grande Arménie », entretenu par quelques extrémistes et par certains pays étrangers ont conduit la région à une situation désastreuse qu’il s’agit aujourd’hui de liquider dans la paix.

« La conduite de nos opérations militaires pendant la deuxième guerre du Karabagh a clairement démontré le très haut niveau de capacité des forces armées azerbaïdjanaises, la discipline et la volonté politique du gouvernement azerbaïdjanais » notre le président Aliyev. « Nous n'avons pas exercé de vengeance. On peut imaginer les sentiments que nous avons tous éprouvés pendant ces années d'occupation, notamment à notre retour au Karabakh, où nous avons constaté la barbarie et le vandalisme. Nous avons mené la guerre dans le respect de toutes les règles internationales et de notre propre conception des valeurs. Nous avons subi des pertes, et malheureusement, l'Arménie et les forces étrangères qui la soutenaient lui ont donné de très mauvais conseils. En réalité, le 10 novembre 2020, l'Arménie a signé l'acte de capitulation. Mais l’Arménie a continué à se comporter comme s'il n'y avait pas eu 30 ans d'occupation, ni de souffrances pour le peuple azerbaïdjanais, ni de guerre de 44 jours, et elle a simplement reçu de très mauvais conseils de ses soi-disant amis. Les armes meurtrières fournies par de nouveaux amis arméniens ne conduiront pas véritablement à la paix et à la stabilité. Elles ne feront qu'engendrer des tensions potentielles à l'avenir.

Nous savons qu'il existe en Arménie des groupes revanchards assez puissants. Tant qu'un accord de paix ne sera pas signé et que l'Arménie n'aura pas renoncé à toutes ses revendications territoriales sur l'Azerbaïdjan, toujours inscrites dans la Constitution, et n'aura pas fait preuve d'une volonté sincère de normaliser ses relations avec ce pays, la menace d'un nouveau conflit militaire subsistera. Enfin, près de cinq ans se sont écoulés depuis 2020, et pourtant, nous sommes toujours confrontés à des spéculations et des accusations infondées selon lesquelles l'Azerbaïdjan préparerait une nouvelle agression contre l'Arménie. Cette propagande noire est toujours principalement alimentée par le gouvernement français et ceux qui suivent sa politique au sein de l'Union européenne, ainsi que par le Département d'État sous Blinken. Si nous avions voulu poursuivre la guerre en novembre 2020, nous l'aurions déjà fait. Nous ne voulions pas que la guerre continue, car nous ne voulions pas que des gens meurent. Mais en même temps, nous devons rester vigilants. N'oublions pas 30 ans d'occupation. N'oublions pas les rêves de « grande Arménie », qui circulent encore, non seulement dans la diaspora, en France et aux États-Unis, mais aussi au sein du gouvernement arménien et dans tous les milieux politiques. Rares sont les hommes politiques arméniens qui ne rêvent pas de reconquérir le Karabakh. C'est la réalité et nous devons vivre avec. C'est pourquoi nous continuons à consacrer des sommes importantes au renforcement de nos capacités militaires. Ce n'est pas parce que nous préparons une prétendue agression. C'est parce que nous, victimes d'une agression, voulons pouvoir nous défendre et punir l'Arménie si, une fois de plus, elle décide de nous nuire. »

Avec les États-Unis, l’espoir d’un resserrement des liens

A ce propos, le soutien inconditionnel de l’administration Biden à l’Arménie a inutilement entaché des relations américano-azerbaïdjanaises, pourtant excellentes jusque-là. Le chef de l’État azerbaïdjanais regrette cette situation et espère un retour à la normal avec Donald Trump.

« J'ai pris mes fonctions présidentielles en 2003, sous la présidence de George Bush, et les relations entre les deux pays étaient très bonnes. Nous appréciions tous deux grandement le soutien mutuel et avons reconnu et annoncé publiquement l'importance stratégique de nos relations bilatérales. » rappelle Ilham Aliyev. « L'Azerbaïdjan a été l'un des premiers pays non membres de l'OTAN à participer aux opérations en Afghanistan et en Irak, à la demande de l'administration américaine. Sinon, nous n'y serions pas allés. Nous avons fourni non seulement un soutien matériel par l'envoi d'un grand nombre de nos militaires, mais aussi d'importantes liaisons de transport vers l'Afghanistan, que ce soit par voie aérienne ou terrestre, et via la mer Caspienne. Cela a été très apprécié par les gouvernements américains sous la présidence Bush. Cependant, sous l'administration Biden-Blinken, les relations entre les États-Unis et l'Azerbaïdjan peuvent être qualifiées de crise. Et la raison fut la politique anti-azerbaïdjanaise du Département d'État dirigé par M. Blinken et de nombreux membres anti-azerbaïdjanais de l'administration du président Biden. Par exemple, lorsque l'Azerbaïdjan était nécessaire aux États-Unis, l'article 907 de la loi sur le soutien à la liberté, qui était discriminatoire à son égard, a été levé, et chaque président des États-Unis accordait une dérogation chaque année. Mais dès que l'administration Biden-Blinken a quitté l'Afghanistan – et nous avons tous vu comment elle s'y est prise – elle a réimposé cet amendement contre nous. Un tel manque de gratitude est donc très préjudiciable à l'administration elle-même, car qui lui fera confiance après cela ?

Les États-Unis, sous la direction de l'équipe Biden-Blinken, ont pris unilatéralement parti pour l'Arménie. C'était la première fois officiellement qu'ils le faisaient depuis le début du conflit arméno-azerbaïdjanais. Certes, nous savions tous quel soutien l'Arménie avait reçu de toutes les administrations démocrates, mais pourtant, jamais dans l'histoire du processus de médiation américain, ils n'avaient pris unilatéralement parti pour l'Arménie. Heureusement, dès l’arrivée de la nouvelle équipe, les tentatives de créer des divisions dans le Caucase, d'isoler l'Azerbaïdjan, de nous discriminer et de répandre des rumeurs sur l'Azerbaïdjan ont cessé. Dès le départ de l'équipe Biden-Blinken, toutes ces insinuations contre l'Azerbaïdjan ont immédiatement cessé. Leurs médias, très agressifs à notre égard – ceux que le président Trump qualifie de « fake news », comme le Washington Post, le New York Times, Politico, etc. – ont immédiatement cessé de publier tous ces articles choquants sur l'Azerbaïdjan. Nous savions que la source de ces articles était le Département d'État. Il en était de même pour l'USAID. Compte tenu du programme de l'administration Trump, nous pouvons envisager que cette période de nos relations sera une excellente occasion de renforcer notre partenariat. Dans l'intérêt national américain, je peux affirmer en toute autorité que des relations solides avec l'Azerbaïdjan sont essentielles pour cette région. L'Azerbaïdjan est un pays leader dans le Caucase du Sud. En tant que membre du Sud global, fort d'une position forte au sein du Mouvement des non-alignés – que nous présidons avec succès depuis quatre ans – et fort de nos liens étroits avec la région d'Asie centrale, comme nous l'avons déjà évoqué, ainsi que de nos capacités, de notre potentiel économique, de nos ressources énergétiques et d'une armée qui a démontré sa puissance sur le champ de bataille, et non lors de défilés, et de nos relations politiques, l'Azerbaïdjan peut être un partenaire essentiel pour les États-Unis. »

Quelle solution pour l’Ukraine ?

Difficile d’aborder la question des relations internationales sans aborder celle de la guerre entre l'Ukraine et la Russie. Après avoir lui-même subi, pendant presque 30 ans, une revendication territoriale étrangère, l’Azerbaïdjan, malgré ses relations historiques avec la Russie, ne pouvait que soutenir l’Ukraine.

« Nous avons toujours soutenu, soutenons et continuerons de soutenir l'intégrité territoriale et la souveraineté de l'Ukraine. En tant que pays ayant souffert de l'occupation et de la détérioration de son intégrité territoriale, nous comprenons parfaitement cette situation. » a rappelé Ilham Aliyev, « cependant, la question clé est de savoir comment et si ce cessez-le-feu – ou un éventuel cessez-le-feu temporaire – sera durable. En tant que pays ayant connu deux guerres actives et une période entre les deux, je peux vous dire qu'un cessez-le-feu n'arrête jamais la guerre. Jamais, et il ne s'est pas arrêté dans notre cas. Ce n'est qu'un répit temporaire pour permettre aux pays de se regrouper, de se mobiliser et de repartir de zéro. Pendant les 26 ans du cessez-le-feu, l’Arménie a construit cinq, parfois six, voire davantage de lignes de génie : tranchées, barbelés, champs de mines. Nous avons donc des victimes de mines chaque semaine, dont près de 400 personnes, dont plus de 70 tuées et d'autres grièvement blessées. Alors, quand on parle de cessez-le-feu ou de paix en Ukraine, comprend-on à quel point il sera difficile de contrôler les troupes ? »

Pessimiste sur une issue négociée de l’affrontement, le président azerbaïdjanais regrette de n’y voir qu’une solution réaliste : « Je ne vois aucune perspective de paix entre l'Ukraine et la Russie dans un avenir proche. La Russie a déclaré les territoires occupés comme faisant partie de la Russie. Comment peuvent-ils revenir en arrière ? L'Ukraine considère, comme le monde entier, ces territoires occupés comme faisant partie de l'Ukraine. Comment imaginer qu’ils se sacrifieront et diront : « Finalement, ce territoire ne pas partie de l'Ukraine » ? Malheureusement, les guerres prennent fin lorsqu'il y a une capitulation finale. C'est ainsi que les guerres prennent fin : c'est la réalité. »

L’union du monde turcique

Face aux grandes puissances qui émergent, il est plus que jamais nécessaire aux nations qui souhaitent conserver un poids dans les relations internationales de se regrouper en fonction de leurs intérêts commune et de leurs affinités. C’est précisément le cas du monde turcique.

« Les relations entre les pays du monde turc sont extrêmement importantes pour nous. » a insisté le président Aliyev . « Elles constituent l'une des principales priorités de notre politique étrangère. Nous savons que de nombreuses organisations refusent la comparaison, mais la particularité de l'Organisation des États turcs réside dans le fait que sommes unis par l'histoire, l’appartenance ethnique, les racines communes, les similitudes linguistiques, la culture, les traditions et les valeurs que nous partageons. Alos, il est difficile de ne pas comparer, et je vais le faire. Prenons l'exemple de l'Union européenne : elle est constituée de pays qui défendent des valeurs radicalement différentes. Des pays dont les populations sont radicalement différentes. Si l'on considère le Sud et le Nord, l'évolution politique de certains pays est également radicalement différente. Nous constatons actuellement de nombreux désaccords au sein de l'Union européenne concernant les valeurs, la culture, les traditions, les migrants, les droits de douane, etc. Est-ce ainsi au sein de l'Organisation turque ? Non, nous n'avons aucun point de désaccord, ni sur les plans bilatéral ni multilatéral et nous souhaitons voir l'organisation se consolider et être plus performante. À cette fin, l'Azerbaïdjan met tout en œuvre.
Alors quels sont les points sur lesquels nous devons progresser ? Je pense que les efforts que nous déployons tous sont insuffisants dans le monde en rapide évolution d'aujourd'hui. Nous voulons nous faire entendre davantage, être plus actifs et avoir notre mot à dire sur les affaires mondiales. Compte tenu de la géographie et de la population, si l'on ajoute à cela les capacités militaires, il est bien connu que l'armée turque est la plus puissante d'Europe. Les capacités militaires de l'Azerbaïdjan ont également été démontrées. Si l'on ajoute cela, nous pouvons véritablement devenir un centre d'activité internationale à l'échelle mondiale, notamment face aux conflits internes, à la méfiance et au manque de confiance mutuelle au sein de certaines organisations. J'ai mentionné l'Union européenne. Je peux aussi mentionner l'OTAN. Nous savons tous ce que certains pays membres de l'OTAN pensent actuellement de l'article 5 [sur le principe de défense collective – NDLR]. Que cela soit pris en compte ou non, il existe une certaine méfiance envers l'OTAN, considérée comme l'une des organisations internationales les plus puissantes à l'échelle mondiale. Nous devons être plus actifs. Nous devons devenir le centre du processus décisionnel dans une vaste zone d'Eurasie, au moins. »

L’Europe, toujours à côté des réalités

Récemment, l’Europe a tenté de manifester à nouveau des objectifs au Caucase du Sud, malgré l’échec du groupe de Minsk et le parti-pris affiché par l’Unions européenne, en faisant mine d’en oublier les deux principaux acteurs : l’Azerbaïdjan et la Géorgie. Ce qui a naturellement fait réagir le président azerbaïdjanais :

« Franchement, j'ai été surpris d'apprendre les propos tenus par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, en Ouzbékistan, lors du sommet des dirigeants d'Asie centrale avec la Commission européenne. Elle y évoquait l'ouverture des frontières entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie, et entre l'Arménie et la Turquie, afin de faciliter le corridor central, comme on l'appelle en Europe, la « porte mondiale ». C'était très étrange, car ce corridor existe et l'Arménie n'y joue aucun rôle. On comprend les sentiments des bureaucrates européens envers l'Arménie, mais on ne peut ignorer la carte. Et nous, en Géorgie et en Azerbaïdjan, avons fourni toutes ces infrastructures qui aident aujourd'hui les Européens à communiquer avec l'Asie centrale : les ports maritimes géorgiens, la ligne ferroviaire Bakou-Tbilissi-Kars, le port azerbaïdjanais d'Alat, la navigation caspienne, essentielle au transport. Les Européens semblent vouloir oublier cela. Ils veulent seulement ouvrir la frontière entre la Turquie et l'Arménie, ouvrir la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Qu'est-ce que l'Europe a à voir là-dedans ? Les relations entre la Turquie et l'Arménie, et entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie, cela ne les regarde pas. Plus l'Union européenne s'éloigne de ces questions, mieux c'est pour tout le monde. D’ailleurs pas un seul mot n'a été prononcé sur la Géorgie. Comme si la Géorgie n'existait pas. C'est injuste, et l'ingérence de la Commission européenne dans la politique interne de la Géorgie est absolument inacceptable. C'est un comportement de colonialistes. Les problèmes internes de la Géorgie doivent être résolus par le peuple géorgien, et non par les bureaucrates de Bruxelles. C'est pourquoi nous devons renforcer notre partenariat entre la Géorgie et l'Azerbaïdjan.

Nous souhaitons entretenir de bonnes relations de voisinage avec les institutions européennes, et en particulier avec la Commission européenne, mais pas au détriment de nos intérêts, ni en acceptant leurs tentatives incessantes d'ingérence dans nos affaires intérieures, ou de pressions idéologiques sur les habitants de notre région. Voilà donc comment nous voulons voir le Caucase du Sud ; les principaux pays du Caucase du Sud, l'Azerbaïdjan et la Géorgie, doivent la responsabilité principale de la coopération. Mais bien sûr, l’Arménie, si elle accepte de modifier sa constitution concernant ses revendications territoriales contre l’Azerbaïdjan, pourra se joindre au processus. »

Le Conseil de l'Europe et les autres organisations internationales ont échoué à faciliter la résolution du conflit avec l'Arménie. La raison principale en est son incapacité à agir comme arbitre équitable. Pour des raisons probablement électoralistes, l’Europe a choisi de prendre parti contre l’Azerbaïdjan, au mépris des réalités historiques, et du droit international.

« Oui, je me souviens de l'époque où nous avons rejoint cette institution en 2001. À l'époque, j'étais député, et nous espérions vivement que notre adhésion au Conseil de l'Europe nous permettrait de porter cette question à l'ordre du jour international et d'obtenir le soutien des structures européennes, car il était évident de distinguer la victime de l'agresseur. » Rappelle Ilham Aliyev. « Nous avons commencé à constater que, malheureusement, notre position, pourtant juste, n'était pas soutenue. Nous avons vu beaucoup de lobbyistes pro-arméniens. Et je me souviens même de ceux que nous appelions, entre nous, « ennemis de l'Azerbaïdjan », et ils sont encore nombreux aujourd'hui.

Nos espoirs n'ont donc pas été comblés ; nous n'avons même pas pu impliquer sérieusement l'Assemblée parlementaire dans le traitement de cette question. Le maximum que nous ayons obtenu, si je ne m'abuse, remonte à 2005 : une résolution reflétant le conflit et l'occupation. Pour deux raisons : premièrement, l'Assemblée parlementaire était majoritairement anti-azerbaïdjanaise ; deuxièmement, le Groupe de Minsk de l'OSCE a empêché toutes les organisations de se pencher sur cette question.

Je sais que les coprésidents du Groupe de Minsk de l'OSCE se sont même rendus à Strasbourg pour transmettre au Conseil de l'Europe un message unifié des États-Unis, de la France et de la Russie : « Éloignez-vous de ce processus ; c'est notre monopole. N'intervenez pas. » De plus, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a décidé de punir l'Azerbaïdjan pour le rétablissement de notre souveraineté. En septembre 2023, les séparatistes ont été totalement éradiqués au Karabakh. En janvier 2024, le Conseil de l’Europe a décidé de priver notre délégation de son droit de vote pour cette seule raison. Certes, ils prétendent en faire une sorte de question des droits de l'homme, mais c'est faux.

Comme je l'ai dit, nous faisons partie de cette institution depuis 2001, et jamais auparavant la crédibilité ni les compétences de la délégation azerbaïdjanaise n'avaient été mises en doute. C'est donc précisément parce que nous avions restauré notre souveraineté et notre intégrité territoriale que, quelques mois plus tard, ils ont décidé de nous priver de notre droit de vote. Nous avons alors décidé que, dans ces circonstances, nous rentrerions chez nous. Depuis lors, nous n'avons plus participé à leurs sessions. Et compte tenu du fait que nous n'avons pas participé à l'élection des juges de la Cour européenne des droits de l'homme, toutes les décisions de la Cour européenne sont, pour nous, invalides. Je pense donc que le Conseil de l'Europe s'est tiré une balle dans le pied. Il voulait discriminer l'Azerbaïdjan, nous isoler, mais en réalité, il s'est isolé du Caucase. Et voyez-vous, les Géorgiens ont récemment fait de même. Je soutiens pleinement la décision du gouvernement géorgien de mettre fin à leur présence là-bas, car, encore une fois, il s'agissait de discrimination.

Malheureusement, cette mentalité colonialiste chez certains hommes politiques européens – en particulier ceux qui n'ont pas pu ou n'ont pas réussi à être élus au Parlement européen et à trouver leur place à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe – est contreproductive. D'ailleurs, le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe est venu à Bakou en novembre dernier pour assister à la COP29 et m'a demandé de ne pas nous retirer complètement de l'organisation. J'ai répondu : « D'accord, si vous le demandez, nous resterons. » Mais que nous restions ou que nous partions, rien ne change.

Le monde a changé depuis notre adhésion à cette institution, et l'Europe a profondément changé. Nos aspirations à l'égard de l'Union européenne ont radicalement évolué. Nous bénéficions d'une économie très prospère et autosuffisante, d'un système politique stable, d'une société pleinement consolidée autour d'une idée nationale et, bien sûr, de la victoire lors de la deuxième guerre du Karabagh qui a encore renforcé la cohésion sociale. Les bureaucrates de Bruxelles et de Strasbourg vivent sur leur propre planète. Ils pensent que tout le monde cherche à se rapprocher d’eux. Mais cette époque est révolue. Nous pouvons envisager un partenariat, mais à la condition qu’ils n’interviennent pas dans nos affaires et qu’ils ne cherchent pas imposer leurs prétendues valeurs à notre société. »

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