DROIT À L'AVORTEMENT MENACÉ AUX ÉTATS-UNIS

Paris / La Gazette
Le gouverneur de l'Oklahoma a signé, mardi, une loi votée par le parlement de l'État conservateur du sud des États-Unis qui interdit l'avortement après six semaines de grossesse. Cette ratification intervient alors que la Cour suprême semble vouloir revenir sur ce droit au niveau fédéral.
Droit à l'avortement menacé aux États-Unis : l'Oklahoma durcit sa loi, les Américains se mobilisent
Le gouverneur de l'Oklahoma a signé, mardi, une loi votée par le parlement de l'État conservateur du sud des États-Unis qui interdit l'avortement après six semaines de grossesse. Cette ratification intervient alors que la Cour suprême semble vouloir revenir sur ce droit au niveau fédéral.
Le site Politico a provoqué une déflagration politique en révélant qu'une majorité des juges de la Cour suprême étaient prêts à enterrer l'arrêt Roe v. Wade, qui protège le droit des Américaines à interrompre leur grossesse. Sans même attendre de connaître la position définitive de la juridiction, qui doit se prononcer avant le 30 juin, le gouverneur de l'Oklahoma, Kevin Stitt, a signé, mardi 3 mai, une loi qui interdit aux femmes de son État d'avorter après six semaines de grossesse, rendant immédiatement illégale la quasi-totalité des interruptions volontaires de grossesse (IVG). Le texte prévoit des exceptions médicales pour l'accès à l'avortement, mais pas en cas de viol ou d'inceste.
"Je représente la totalité des quatre millions d'habitants de l'Oklahoma qui, de manière écrasante, veulent protéger les enfants à naître", a écrit sur Twitter Kevin Stitt en promulguant le texte voté par le parlement de l'État jeudi dernier. "Je veux que l'Oklahoma devienne l'État le plus pro-vie dans le pays", a-t-il dit en utilisant l'expression consacrée par les Américains opposés à l'avortement.
Cet État conservateur accueillait depuis quelques mois des milliers de Texanes cherchant à avorter, après le passage d'un texte similaire dans cet État voisin.
Depuis septembre 2021 déjà, le Texas avait mis en place une loi interdisant toute IVG à partir du moment où un battement de cœur de l'embryon est perceptible à l'échographie, soit quatre semaines environ après la fécondation.
La légalité de textes similaires dans d'autres États est étudiée par la Cour suprême depuis plusieurs mois. Mais, lundi soir, la publication par le journal Politico d'un projet de décision de la Cour suprême à ce sujet indique que l'institution fédérale serait sur le point de remettre aux États le pouvoir d'autoriser, ou non, les IVG.
La fuite de ce document, dont l'authenticité a été confirmée par la Cour, qui a rappelé qu'il ne s'agissait pas de la décision définitive, a fait l'effet d'une bombe à Washington et poussé le président démocrate, Joe Biden, à rappeler son soutien au droit à l'IVG. Se disant "très inquiet", le président a appelé les Américains à "choisir des candidats" favorables au droit à l'avortement lors des élections législatives de l'automne.
Des gouverneurs démocrates de plusieurs États, dont la Californie, le Nouveau-Mexique et le Michigan, ont annoncé vouloir consacrer la légalité du droit à l'avortement même si la Cour annulait Roe v. Wade. Mais, d'autres, pour la plupart dans le centre et le sud du pays comme le Wyoming, le Tennessee ou la Caroline du Sud sont prêts à interdire l'avortement purement et simplement.
Reflétant ces fractures, les défenseurs du droit à l'avortement ont donné de la voix mardi, tandis que les opposants savouraient une victoire annoncée.
Des milliers de manifestants ont défilé dans les rues de Washington, New York, Boston, Los Angeles ou Seattle, pour crier leur "colère" face à la crainte d'un "retour en arrière".
Une partie de la population américaine, notamment dans les milieux religieux, n'a jamais accepté la décision de 1973 et a livré pendant des années un combat protéiforme pour la faire annuler : les militants de base occupaient le terrain près des cliniques, tandis que leurs représentants dans les législatures locales adoptaient des milliers de lois restrictives.
La dernière brique de l'édifice a été posée par le président républicain Donald Trump qui, aidé par les sénateurs de son parti, a fait entrer à la Cour suprême trois juges connus pour leurs positions anti-avortement, portant à six magistrats sur neuf la majorité conservatrice de l'instance.