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La députée française Madame Carole Bureau-Bonnard : « C’était émouvant de voir des villages en ruines dans les territoires azerbaïdjanais libérés » (Exclusif)

4 Août 2021 17:04 (UTC+01:00)
La députée française Madame Carole Bureau-Bonnard : « C’était émouvant de voir des villages en ruines dans les territoires azerbaïdjanais libérés » (Exclusif)
La députée française Madame Carole Bureau-Bonnard : « C’était émouvant de voir des villages en ruines dans les territoires azerbaïdjanais libérés » (Exclusif)

Paris / Lagazetteaz

Entretien exclusif avec la députée de l'Assemblée nationale française, Madame Carole Bureau-Bonnard

Vous avez récemment effectué une visite en Azerbaïdjan. Quel était l’objectif de cette visite ?

L’objectif était en partie de nous rendre et de découvrir les territoires libérés (territoires proches de la frontière). Puisque nous étions venus au mois de mars dernier pour pouvoir d’abord rencontrer Monsieur Soltan Mammadov, Chef du groupe de travail pour les relations interparlementaires Azerbaïdjan-France, et puis rencontrer la présidente du Parlement azerbaïdjanais, nous n’avions pas pu, puisqu’il neigeait, aller voir sur place dans quel état se trouvaient ces territoires. L’objectif était de continuer ces relations que nous souhaitons avoir, les députés français et les députés azerbaïdjanais, d’aider aussi à la résolution des accords de paix en entendant quelques responsables politiques d’Azerbaïdjan, à notre niveau parlementaire.

Après le réglement du conflit arméno-azerbaïdjanais du Haut-Karabagh, comment voyez-vous la possibilité de la restauration d’une paix durable entre les deux pays dans le Caucase du Sud ?

On voit qu’il y a encore quelques éléments, par rapport à l’accord qui a été signé au mois de novembre, qui ne sont pas encore respectés. Il faudrait justement évaluer ensemble les éléments bloquants, des deux côtés bien entendu et qu’il puisse y avoir une paix durable et qu’ensuite il y ait la reconstruction nécessaire notamment sur les territoires libérés.

Comment la France peut-elle contribuer à ce processus ?

La France, elle-même co-présidente du Groupe de Minsk, est au cœur du processus de paix et met tout en œuvre pour que l’accord fasse le consensus et soit respecté. Notre travail de députés dans le cadre de ces déplacements est de pouvoir rendre compte de ce qui se passe sur le terrain et d'entreprendre toutes les démarches pour que les accords de paix soient appliqués. Il faut retrouver au plus vite, pour les populations, de l’apaisement, et c'est aux politiques de montrer l'exemple mais je pense pour l’Azerbaïdjan et pour l’Arménie, quand vous serez prêts, les uns et les autres, peut-être pas maintenant, c’est évident, mais très vite, les liens se retisseront. Je suis convaincue que les peuples, par eux-mêmes, ont envie aussi d'une solution durable. C’est peut-être un peu prématuré, mais c’est ce qu’on espère.

Nous sommes allés à Aghdam, Fuzouli. Donc nous avons pu discuter avec des représentants politiques qui étaient là et qui nous ont expliqué en montrant les ruines « voilà, c’est tel endroit, voilà le village, on est au centre de la ville... ». Les conflits laissent des traces dans les esprits et dans les paysages : tout est meurtri. C’était impressionnant, c’était émouvant aussi de voir tout cela. Les ruines des maisons et des mosquées, notamment, donnent une atmosphère très singulière. C’était donc émouvant. Parce qu’il y avait des représentants de familles qui étaient présentes, qui, peut-être, ont dans l’idée de revenir un jour. Elles ont d'ailleurs gardé pour certaines les clés des maisons qui ne sont plus présentes.

La France aide les pays en reconstruction et nos échanges se font déjà sur ces thèmes.

En marge de votre visite dans les territoires libérés, vous avez constaté le lancement des travaux de reconstruction. Mais le processus de déminage entrave l’avancement de ces travaux. Que pourriez-vous nous dire à propos du refus de l’Arménie de remettre à l’Azerbaïdjan toutes les cartes des champs de mines dans les zones libérées ?

Des vies humaines sont en jeu et plusieurs personnes sont décédées parce qu’elles ont voulu revenir, sur le terrain où elles étaient nées. Et il faut pouvoir reconstruire ces territoires. Avec la pandémie mondiale, on parle beaucoup de résilience : même si on n’oublie pas, on se doit d'aller vers l’avenir. Le but, c’est ça. Si on veut penser à l’avenir, il faut le reconstruire, et pour le reconstruire, il faut que les gens puissent y aller, sans avoir peur de perdre leur vie.

En tant que députée, je rendrai compte avec notre délégation, pour faire changer cela ; j'espère vraiment que ces cartes des champs de mines dans les zones libérées seront données. Je sais qu’il y a des négociations en cours entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan pour que le processus de paix soit complet. J’espère avoir l’occasion à un moment, d'échanger sur tous ces sujets avec l’Ambassadrice d’Arménie en France, que j'ai déjà rencontrée.

D’après Vous, quel est le niveau des liens culturels bilatéraux ?

Actuellement, c'est un peu tendu, on ne peut se le cacher. Pouvoir se parler et très vite avancer, pour retrouver des liens apaisés voilà l'objectif. Il est vrai qu'au niveau diplomatique rien n'est facile.

En Azerbaïdjan, on parle du partenariat de la Fondation [Heydar Aliyev] qui a permis de restaurer les églises et d’autres monuments, mais aussi d'une aide au financement au sein du Pavillon des Arts au Louvre, avec d'autres pays bien sûr.

Quel est l’esprit de partenariat entre la France et l’Azerbaïdjan ?

Je pense que nos deux nations se respectent, que chacun des deux côtés a envie de travailler plus ensemble qu’actuellement ; avec une attention diplomatique, la France souhaite une paix durable.

Le Président de la République Emmanuel Macron a directement discuté avec le Président Azerbaïdjanais, il y a eu la visite du Ministre Jean-Baptiste Lemoyne pour les échanges avec le Gouvernement. La France suit de très prés les efforts des deux pays pour les respect des accords de cessez-le-feu.

Tous ces éléments sont les bases de relations entre nos deux pays, les meilleures possibles.

L’Europe s'est construite autour de la France et de l’Allemagne puis progressivement avec les autres pays. Nous avons tous intérêt à nous ouvrir aux pays limitrophes de l'Europe et entreprendre les relations extérieures avec humilité et sagesse. Les relations internationales parlementaires tissées dans le cadre des Groupes d'amitiés de l'Assemblée nationale française nous sont utiles pour construire les bases d'échanges propices à la paix dans la monde, la défense des droits de l'Homme, la démocratie. À la suite de ce voyage, nous rédigerons une lettre aussi, dans lequel nous indiquerons au Président de l’Assemblée nationale française et autres politiques, l’ensemble des contacts que nous avons pris ici et du retour d'expériences que nous en tirons. C’est aussi pour ça que c’est important d’avoir des visites comme nous avons eu aujourd’hui, pour nourrir notre réflexion.

C’est vrai que l’Azerbaïdjan est encore malheureusement peu connu encore en Europe. J’étais en charge des relations internationales à l’Assemblée nationale française pendant deux ans et demi, et je ne connaissais pas dans le détail votre pays, ou son histoire par exemple.

Maintenant le conflit a pris le dessus en terme d'informations. Ce qu’il faudrait c'est un peu plus faire connaitre votre peuple, votre pays, ses origines, son histoire.

Donc, quand on ne connait pas suffisamment, et bien comme moi, il faut venir découvrir, il faut aller à la rencontre, connaitre. C’est le but de mes missions à l'étranger.

Mon engagement, notre engagement reste celui pour la paix.

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Propos recueillis par Samid NASIROV

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