ITALIE : LE GOUVERNEMENT D'EXTRÊME-DROITE DURCIT LES RÈGLES POUR LE SAUVETAGE DES MIGRANTS
Paris / La Gazette
Le gouvernement italien de droite a approuvé des mesures visant à imposer des amendes aux organisations caritatives qui sauvent des migrants en mer et à saisir leurs navires s'ils enfreignent un nouvel ensemble de règles plus strictes - une mesure qui, selon un groupe de campagne, pourrait menacer des vies.
Un décret ministériel approuvé mercredi en fin de journée, consulté par Reuters, stipule que ces navires doivent demander un port et s'y rendre « sans délai » après un sauvetage, plutôt que de rester en mer à la recherche d'autres bateaux de migrants en détresse.
Actuellement, les missions des organisations caritatives, ou organisations non gouvernementales (ONG), en Méditerranée centrale durent généralement plusieurs jours, les bateaux des organisations caritatives menant à bien différentes opérations de sauvetage et prenant souvent des centaines de personnes à bord.
Les navires des ONG doivent également informer les personnes à bord qu'elles peuvent demander une protection internationale partout dans l'Union européenne, précise le décret.
Les capitaines qui enfreignent ces règles s'exposent à des amendes pouvant aller jusqu'à 50 000 euros (53 175 dollars), et des infractions répétées peuvent entraîner la saisie du navire, ajoute le décret.
Depuis son entrée en fonction en octobre, le gouvernement de la Première ministre Giorgia Meloni a pris pour cible les activités des organisations caritatives de sauvetage en mer, les accusant de faciliter le travail des trafiquants d'êtres humains dans un contexte de forte augmentation des arrivées.
Les organisations caritatives rejettent ces allégations.
Riccardo Gatti, responsable d'un navire de sauvetage géré par l'organisation caritative Médecins sans frontières, a déclaré jeudi au quotidien la Repubblica que le décret faisait partie d'une stratégie qui « augmente le risque de mort pour des milliers de personnes. »
Les règles rendant plus difficile la réalisation de sauvetages multiples peuvent bafouer les conventions internationales et sont « éthiquement inacceptables », a-t-il ajouté.
Quelque 102 000 migrants ont débarqué en Italie jusqu'à présent en 2022, selon les données du ministère de l'Intérieur, contre environ 66 500 à la même période l'année dernière, 34 000 en 2021 et un pic de plus de 181 000 en 2016.
Un document du bureau du ministre de l'Intérieur, Matteo Piantedosi, indique qu'environ 10 % seulement des personnes arrivées en Italie en 2022 ont été ramenées à terre par des bateaux d'ONG.
Cependant, il a également déclaré que ces bateaux ont agi comme un « facteur d'attraction » pour ceux qui font le voyage périlleux à travers la Méditerranée depuis la Libye. Les ONG affirment que les données montrent que leur présence en mer n'encourage pas les migrants à partir.
La question de la gestion de l'immigration au sein de l'Union européenne, qui ne connaît pratiquement pas de frontières, est une source de tensions depuis des années. L'Italie et l'Espagne, où arrivent la plupart des bateaux, affirment depuis longtemps que les alliés de l'UE doivent accueillir davantage de migrants arrivant sur leurs côtes.
En novembre dernier, cette question a ravivé des tensions entre l'Italie et la France, Rome ayant refusé de laisser accoster dans ses ports un navire humanitaire ayant 230 migrants à son bord, l’Ocean Viking, qui s'est finalement rendu en France.
